Deux biennales en RDC: des artistes congolais en quête d'un marché intérieur

Infos. Les grandes foires d'art contemporain de Paris et Londres, d'accord, mais pourquoi pas les Biennales de Kinshasa et Lubumbashi?Les plasticiens congolais, ultra-cotés à l'étranger, sont en quête de collectionneurs pour garder leurs oeuvres au pays lors de ces deux rendez-vous en République démocratique du Congo.

Deux biennales en RDC: des artistes congolais en quête d'un marché intérieur

Les disciples de Chéri Samba, Chéri Chérin, Moké...s'exportent toujours aussi bien.Aux côtés des Nigérians, Sud-Africains, Éthiopiens...ils ont porté haut les couleurs de la RDC dans les deux derniers salons entièrement consacrés à la création vivante en Afrique (Akaa à Paris et 1_54 à Londres et New York, avant Marrakech début 2020).

Francis Mampuya et ses traits vibrants comme les manifestations aux quatre coins du monde, Steve Bandoma qui tourne en dérision la mainmise de la Chine sur l'Afrique, Kura Shomali et sa fresque sur les migrants: tous jouissent d'une belle cote d'amour, surtout depuis l'exposition "Congo Beauté" à la Fondation Cartier à Paris en 2015 organisée par la galerie Magnin.

Egalement présent à chaque grand rendez-vous, l'incontournable Freddy Tsimba expose dans le monde entier ses sculptures à partir d'objet de récupération, avec une prédilection pour les douilles des munitions qui  ont ravagé la RDC depuis 25 ans.

Freddy Tsimba a frappé un grand coup il y a tout juste un an, en vendant l'une de ses oeuvres au théâtre de Chaillot à Paris.

Les autres plasticiens congolais poursuivent la tradition des peintres populaires, ou explorent des nouvelles voies d'expression.

C'est le cas de Géraldine Tobe, qui dessine des silhouettes avec des traces de fumée noire sur la toile.

- Autodictate-

Aux frontières de l'art décoratif, Pita Kalala tape à l'oeil avec ses gros plans de jeunes Kinoises très branchées dont les lunettes de soleil reflètent les scènes de vie de la mégapole africaine.

En marge de la matrice des Beaux Arts de Kinshasa, qui forment la plupart des jeunes artistes, autodidacte, venu de Ndjili (un quartier populaire), Francklin Mbungu s'est ouvert les portes des galeries en Europe à plus de 40 ans.

Sa marque de fabrique: une technique mixte peinture-collage au service des scènes de la "Belle époque" zaïroise des années 70 (coupes afro, pantalon pâte d'éph'...).

Adulés hors des frontières, les artistes congolais sont à l'honneur chez eux à l'occasion de deux biennales à Lubumbashi (jusqu'à dimanche) et Kinshasa (terminée jeudi soir).

L'enjeu: stimuler la demande intérieure."Il y a des acheteurs expatriés.Les Congolais n'achètent pas encore.Ils préfèrent investir dans l'immobilier", regrette Freddy Tsimba.

A Kinshasa, la biennale est l'oeuvre du plasticien Vitshois Mwilambwe Bondo, directeur de Kin Art Studio, centre et lieu de résidence artistique.

Dans cet espace installé au coeur d'une ancienne usine textile, Vitshois affirme avoir vendu pendant la Biennale une toile du jeune Eddy Ilunga Kamuanga pour 65.000 dollars - à un collectioneur expatrié.

L'art n'est pas qu'une affaire d'argent, proclame l'un des inspirateurs de la Biennale de Lubumbashi, l'artiste multimédia Sammy Baloji: "Au Congo, il n'y a pas d'appuis de l'Etat à la culture.Il faut commencer par l'éducation et la formation" des acheteurs et des collectionneurs.

- Mécène -

Au hasard de l'enquête, l'AFP a croisé l'homme d'affaires George Forrest, deuxième fortune de l'Afrique francophone, dans les jardins de l'Académie des Beaux-Arts, devant une sculpture.

"J'achète et je soutiens (les artistes congolais) depuis longtemps", lance le magnat belge d'origine néo-zélandaise (mines, banque...) installé depuis plusieurs générations à Lubumbashi.

Dans la cité minière, George Forrest a ouvert la galerie Dialogues, association sans but lucratif.Le coût des oeuvres va de 150 à 2.000 dollars."On essaie d'avoir une politique tarifaire qui permettent à tout le monde d'acheter des oeuvres d'art.On veille à ce que les jeunes artistes vivent de leur travail", avance sa responsable Marie-Aude Delafoy.

A Kinshasa, le marché de l'art est aussi animé par des expatriés amoureux du Congo et ses artistes.C'est le cas de Chantal Tombu et Alain Huart, à la tête de la galerie "Bilembo" (trace en lingala), qui développe une approche exigeante et didactique de l'art contemporain congolais.

On trouve de tout à la Symphonie des Arts, un lieu animé par Christa Goëpfert, une Allemande installée depuis 50 ans à Kinshasa: des sculptures en malachite produites en série, comme des toiles de Moke fils, de l'école des peintres populaires.

Un jeune kinois s'est lancé en juin 2018 dans l'aventure de la vente en ligne d'oeuvre d'art (galerie Bandombe) avec 45 oeuvres vendues à ce jour.

Le marché de l'art congolais au Congo cherche encore à se structurer."Les Congolais n'ont pas encore compris que l'art est un investissement qui rapporte à la longue", regrette Freddy Tsimba.

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