Le président zimbabwéen Robert Mugabe l'a dit et redit: le gouvernement d'union formé il y a deux ans avec ses opposants a fait son temps et le pays doit organiser des élections à la mi-2011, une perspective qui soulève le spectre d'un regain de violences politiques.
"Si seulement ceux qui veulent des élections pouvaient faire leurs affaires entre eux sans nous impliquer, nous le peuple ordinaire", soupire Ernest Tsambo, un villageois du district de Marondera (est).
"Pour l'instant, nous sommes en paix avec nos voisins mais dès que la campagne électorale débutera, les gens vont recommencer à se battre", prédit-il.
Robert Mugabe, 86 ans et au pouvoir depuis l'indépendance en 1980, souhaite des élections rapides pour mettre fin à la coalition formée le 11 février 2009 avec son ancien rival Morgan Tsvangirai.
Leur gouvernement, prévu pour durer deux ans, a permis de stabiliser l'économie.Mais les désaccords constants entre les deux camps empêchent un redressement durable du pays et les Zimbabwéens sont plutôt favorables au changement.
Près des trois quarts d'entre eux souhaitent des élections cette année, selon un sondage du groupe d'instituts de recherche Afrobarometer publié en janvier.
En même temps, 71% des personnes interrogées ont déclaré craindre être "victimes d'intimidations ou de violences" durant la campagne électorale.
"Dès qu'on parle d'élections, les gens pensent au traumatisme de 2008", quand la défaite du camp présidentiel aux législatives avait entraîné un déferlement de violences dans le pays, explique le directeur de l'Association des droits de l'Homme du Zimbabwe, Okay Machisa.
"Pourquoi parler de nouvelles élections quand on n'a même pas soigné les blessures de 2008?" s'interroge-t-il."On devrait plutôt s'attaquer à des réformes des forces de sécurité, des médias et du système électoral."
Le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) de Morgan Tsvangirai tente d'obtenir des garde-fous dans ces secteurs afin de garantir un scrutin libre et équitable.
"La sécurité des individus doit être assurée", souligne à l'AFP son secrétaire général et ministre des Finances, Tendai Biti."Nous disons oui à des élections, mais non à un bain de sang!"
Sauf qu'à l'heure actuelle "les listes électorales sont un vrai foutoir", regrette Rindai Chipfunde-Vava, directeur du Réseau de soutien aux élections du Zimbabwe (ZESN), une coalition d'ONG."Il faut l'expurger des morts", qui représente près d'un tiers des noms, conseille-t-il.
"Nous réclamons également un accès équitable aux médias et un renforcement des structures sensées panser les plaies de 2008", poursuit le responsable associatif."Sans ces réformes, nous reviendrons à la case départ."
Un organe de réconciliation nationale, créé après la formation du gouvernement d'union, a jeté l'éponge face aux disputes entre parties rivales.
Quant aux médias, si des journaux indépendants ont pu voir le jour en 2010, la télévision, la radio et le quotidien d'Etat The Herald restent des organes de propagande présidentielle.
"Malgré le gouvernement d'union, notre culture politique n'a pas changé par rapport à 2008", conclut Takura Zhangazha, un analyste indépendant.
"La question des violences politiques n'a pas été résolue", explique-t-il."Et le citoyen zimbabwéen n'a pas confiance dans la capacité de son vote à changer quoi que ce soit."
De récentes tensions semblent donner raison aux pessimistes.Après un calme relatif, des échauffourées ont éclaté en janvier entre des jeunes de la Zanu-PF et du MDC, faisant plusieurs blessés.
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