Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a fait une brève apparition à la télévision pour prouver qu'il était toujours présent mardi dans le pays, après une semaine d'insurrection populaire et des violences meurtrières fermement condamnées dans la région et en Occident.
Selon des témoignages recueillis par la présidente de la Fédération internationale des Ligues de droits de l'Homme (FIDH) Souhayr Belhassen, les violences se poursuivaient dans la matinée à Tripoli.
"Les milices, les forces de sécurité fidèles à Kadhafi sévissent de façon terrible, cassent les portes, pillent", a-t-elle indiqué à l'AFP, citant des informations communiquées par la Ligue libyenne des droits de l'Homme.
"Il est impossible de retirer les corps dans les rues, on se fait tirer dessus", a-t-elle rapporté.
Lundi soir, des témoins contactés par l'AFP ont fait état de violents affrontements dans les quartiers de Fachloum et Tajoura, dans la banlieue est de Tripoli, l'un d'eux parlant de "massacres".Mais la télévision d'Etat a démenti mardi tout "massacre".
Mardi après-midi, des habitants armés de gourdins tenaient des barrages et filtraient les entrées de ces deux quartiers où des impacts de balles étaient visibles sur les murs, selon des témoins.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a indiqué avoir reçu des "appels de détresse" et contacté les autorités libyennes à Genève pour proposer de l'aide humanitaire d'urgence.
"Beaucoup de soldats libyens ont pris le parti des manifestants.Mais ceux qui tirent sont les soldats d'élite et les mercenaires" venus du Tchad ou du Nigeria, a assuré à l'AFP Shaban Egale, un Libyen vivant à Stockholm, citant des proches sur place.
Dans la nuit, la télévision a montré le colonel Kadhafi, au pouvoir depuis bientôt 42 ans et dont le départ est réclamé par les manifestants, montant dans une voiture, un parapluie à la main, devant sa maison dans la résidence-caserne de Bab Al-Aziziya.
"S'il n'avait pas plu, je me serais adressé aux jeunes sur la place Verte (lieu de rassemblement de ses partisans, NDLR) et j'aurais passé la nuit avec eux pour leur prouver que je suis toujours à Tripoli, et non au Venezuela et (leur demander) de ne pas croire les télévisions de ces chiens errants", a-t-il affirmé selon l'agence officielle Jana, en le citant mardi.
Le chef de la diplomatie britannique William Hague avait déclaré lundi que le colonel Kadhafi pourrait être en route vers le Venezuela.
Selon le chef de la diplomatie égyptienne, Ahmad Aboul Gheit, les pistes de l'aéroport de Benghazi, bastion de l'opposition et épicentre du mouvement lancé le 15 février, ont été bombardées.
"J'ai vu de mes propres yeux des personnes armées qui descendent des ambulances et qui tirent sur la foule" à Benghazi, a raconté à l'AFP Mayar une habitante de la ville, précisant que depuis lundi soir le calme y était revenu.
A Tripoli, touché par les violences depuis dimanche, beaucoup d'étrangers restaient confinés chez eux.L'aéroport était bondé, des centaines d'expatriés cherchant à monter à bord d'un avion pour quitter le pays.
L'Italie, la France, l'Allemagne et l'Ukraine ont annoncé mardi l'envoi d'avions en Libye pour procéder à des évacuations de ressortissants.
Le bilan des violences s'élevait lundi à au moins 233 morts, selon Human Rights Watch, à "300 à 400" morts, selon la FIDH.
Plusieurs dirigeants libyens ont fait défection à l'instar du ministre de la Justice Moustapha Abdel Jalil pour protester contre les violences contre les manifestants.C'est également le cas de diplomates en poste à l'étranger, comme l'ambassadeur en Inde, au Bangladesh et aux Etats-Unis.
La haut commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme, Navi Pillay a exigé l'ouverture d'une "enquête internationale indépendante" sur les violences, évoquant la possibilité de "crimes contre l'humanité".
Le conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir mardi sur la Libye, à la demande de l'ambassadeur adjoint du pays.
Dans la région, l'Organisation de la conférence islamique (OCI), l'Iran, le Hamas et le Qatar ont fermement condamné les violences.
Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a appelé les autorités libyennes à ne pas commettre "l'erreur" d'ignorer les demandes du peuple pour plus de démocratie, tout comme le président syrien Bachar Al-Assad qui a demandé aux dirigeants arabes d'être plus à l'écoute de leur peuple.
Quant au président russe Dmitri Medvedev, il a redouté l'arrivée au pouvoir de "fanatiques".
Sur le plan économique, l'escalade meurtrière en Libye, important producteur mondial d'or noir, a entraîné une hausse des prix du pétrole à des niveaux inédits depuis 2008.
Les cours du brut bondissaient à Londres au-dessus de 106 dollars, tandis que le prix du panier de référence de l'Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) franchissait les 100 dollars pour la première fois en deux ans et demi.Le pétrole a par ailleurs ouvert à New York en hausse de plus de 8%, à 93,36 dollars le baril.
L'Opep s'est dit prête à réagir si besoin, l'Arabie saoudite assurant qu'elle ne laisserait pas s'installer une pénurie de l'offre de pétrole.
Après Fitch, l'agence de notation Standard and Poor's a annoncé mardi avoir abaissé d'un cran la note souveraine de la Libye, à BBB+ contre A-.
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