Lazarus Chakwera, qui doit être investi lundi, a remporté haut la main le scrutin en devançant avec 58,5% des suffrages le chef de l'Etat sortant Peter Mutharika, dont la réélection l'an dernier avait été invalidée par la justice.
La décision historique de la Cour constitutionnelle malawite, qui n'a pour seul précédent en Afrique subsaharienne que le Kenya en 2017, est l'aboutissement de longs mois de manifestations et d'une intense bataille judiciaire engagée par une opposition unie.
"Pendant un an, ils (l'opposition) ont persévéré avec de grosses manifestations contre le vol injustifié de leur vote en dépit des menaces et de la répression d'un gouvernement discrédité", souligne l'historien Paul Tiyambe Zeleza.
La victoire de Lazarus Chakwera, un ancien pasteur évangéliste de 65 ans, est le résultat de "batailles ininterrompues livrées par le peuple pour la démocratie" dans un pays à l'histoire pacifique, ajoute-t-il.
"La volonté du peuple s'est retournée contre Mutharika (...) et a convaincu les juges, les responsables de la Commission électorale et les autres à se lever", ajoute Nic Cheeseman, professeur de sciences politiques à l'université de Birmingham, au Royaume-Uni.
"Félicitations au peuple du Malawi !", a lancé le secrétaire d'Etat américain adjoint pour l'Afrique, Tibor Nagy, résumant un sentiment très partagé.
"Cette élection témoigne de la force de vos institutions et de votre engagement pour la démocratie", a-t-il ajouté sur Twitter, en référence au système judiciaire du Malawi et à son armée, qui est intervenue l'an dernier pour assurer la protection des manifestants hostile au gouvernement.
La victoire de Lazarus Chakwera "va assurément influencer les prochaines élections sur le continent africain", où des présidents ou des partis s'accrochent au pouvoir depuis des décennies, estime Grant Masterson de l'Institut électoral pour la démocratie durable (EISA), basé en Afrique du Sud.
"Des dirigeants de l'opposition vont être encouragés" à saisir davantage les tribunaux et à descendre plus souvent dans la rue, ajoute-t-il à l'AFP.
- Nouvelle vie -
Car contrairement au Kenya, où elle a confirmé la victoire du président sortant Uhuru Kenyatta finalement réélu, la présidentielle rejouée au Malawi a permis l'alternance.
Plusieurs opposants des pays voisins du Malawi ne s'y sont d'ailleurs pas trompés.
Mmusi Maimane en Afrique du Sud et Nelson Chamisa au Zimbabwe n'ont même pas attendu l'annonce officielle de la victoire de Lazarus Chakwera pour le féliciter."Nouvelle vie au Malawi", a lancé Nelson Chamisa.
"Il y a la perception répandue que les électeurs africains sont passifs et apathiques" mais "quand suffisamment de citoyens se soulèvent, au Malawi, au Soudan (2019-2020) ou ailleurs, ils obtiennent au final le changement", affirme Grant Masterson.
"Les Etats qui cherchent à frustrer les ambitions de leurs citoyens ne peuvent réussir qu'un certain temps", ajoute-t-il.
Encore faut-il qu'outre la mobilisation continue de la rue et la crédibilité des institutions, l'opposition soit, comme au Malawi, unie, prévient Grant Masterson.
Pour le scrutin du 23 juin, Lazarus Chakwera a réussi à fédérer une dizaine de partis derrière sa candidature.
Il a obtenu le soutien clé de l'ancienne présidente Joyce Banda (2012-2014) et surtout du vice-président Saulos Chilima, qui a renoncé à se présenter après être arrivé en troisième position lors du scrutin en 2019.
Au Zimbabwe par exemple, où la Zanu-PF est au pouvoir depuis 1980, le principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), est profondément divisé.
Lors de la dernière élection présidentielle organisée en 2018, le chef de l'Etat sortant Emmerson Mnangagwa avait en face de lui pas moins de 22 candidats.Au Malawi, trois candidats seulement étaient en lice cette année.
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