"Je suis ici pour voter", disait Elijah Bono, enseignant de 43 ans, devant le bureau de Kendeja dans la banlieue orientale de Monrovia."C'est le seul moyen que nous ayons, nous autres citoyens, de changer ou de conserver nos dirigeants".
Comme lui, des Libériens se sont déplacés tôt, au moins une heure et demie avant l'ouverture prévue à 8H00 (locales et GMT) à New Kru Town par exemple, quartier populaire du nord-ouest de la capitale; et ils l'ont fait en nombre.On faisait la queue devant plusieurs bureaux de la capitale, ont constaté les correspondants de l'AFP.
M. Weah, venu voter avec sa femme Clar dans une école publique de Kendeja, a exhorté ses concitoyens à aller voter nombreux et à "repartir en paix"."Ce pays a besoin de paix, nous n'avons pas besoin de le démolir", a-t-il dit, répondant aux craintes de violence suscitées par l'attaque menée dimanche contre un cortège de l'opposition et qui a fait des blessés dans le nord-ouest.
Environ 2,5 millions d'électeurs sont appelés à approuver ou non huit amendements à la Constitution, dont un réduisant la durée du mandat présidentiel de six à cinq ans.Le mandat des députés passerait également de six à cinq ans, celui des sénateurs de neuf à sept.Le référendum est couplé avec des élections pour renouveler la moitié des 30 sièges de sénateur.
Ces sénatoriales revêtent un enjeu intérieur certain.Mais Manuela Jackson, étudiante de 23 ans à l'université du Liberia, ne cache pas être venue surtout pour le référendum.
"Je suis ici depuis 5H30 pour dire oui à la double nationalité.C'est tout ce qui m'intéresse dans ce scrutin", assène-t-elle.Son frère, dit-elle, vit aux Etats-Unis, comme un certain nombre de Libériens en raison des liens historiques particuliers entre les deux pays, et a obtenu la nationalité américaine.Mais la double nationalité ne lui est pas reconnue au Liberia.
"Il y aura encore des restrictions à la double nationalité de mon frère, mais au moins il sera considéré comme Libérien", dit-elle.
Les bureaux doivent fermer à 18H00.Les premiers résultats sont attendus avant la fin de la semaine.
- Une société divisée -
L'échéance a valeur de double test pour le président Weah, qui avait soulevé un immense espoir en 2018 en accédant au pouvoir dans un des pays les plus pauvres du monde et toujours marqué par la guerre civile de 1989-2003 et l'épidémie d'Ebola de 2014-2016.Il n'a pas réussi à redresser l'économie et l'enthousiasme a fait place au désenchantement.
Bien que M. Weah, 54 ans, en soit toujours à son premier mandat, ses adversaires craignent qu'il tire profit d'une modification de la Constitution pour faire valoir que les compteurs sont remis à zéro et briguer le moment venu un troisième mandat, comme viennent de le faire ses homologues et voisins guinéen Alpha Condé et ivoirien Alassane Ouattara.
Il "ne pense pas à un troisième mandat", a assuré son chef de cabinet Nathaniel McGill en octobre.
Les principaux partis d'opposition ont appelé à boycotter le référendum.Mohammed Aly, secrétaire général des Collaborating Political Parties (CPP), coalition d'opposition, invoque l'absence de débat sur des questions ardues."On ne sait même pas quelles implications cela aura si on vote oui ou non", disait-il récemment.
La question de la double nationalité divise elle aussi la société du Liberia, plus ancienne république d'Afrique noire fondée au XIXe siècle sous l'impulsion des Etats-Unis pour des esclaves noirs affranchis.
Des centaines de milliers de Libériens ayant fui la guerre et la pauvreté vivraient à l'étranger, dont bon nombre aux Etats-Unis dont ils ont secrètement la nationalité.
La population "autochtone" reproche à l'élite américano-libérienne d'utiliser l'argent qu'elle gagne au Liberia pour se construire des propriétés aux Etats-Unis.
Si la proposition de révoquer l'interdit de 1973 sur la double nationalité est adoptée, les futurs binationaux auront accès à la propriété au Liberia, ce qui devrait donner un coup de pouce à l'économie du pays de 4,8 millions d'habitants confronté aux pénuries et à l'inflation.
Les détenteurs de la double nationalité n'auraient cependant toujours pas le droit d'exercer des fonctions électives.
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