"Je lui ai rappelé que le contrôle des frontières a été et doit rester de la responsabilité partagée de l'Espagne et du Maroc", a déclaré la ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha Gonzalez Laya, à la presse.
A Rabat, le ministère des Affaires étrangères marocain a annoncé le rappel immédiat "pour consultation" de son ambassadrice.
Face à la gravité de la situation, le Premier ministre espagnol, le socialiste Pedro Sanchez, est arrivé vers 15H00 GMT à Ceuta, où il a été accueilli par les huées de quelques dizaines de résidents, selon des images mises en ligne par le journal local.
Il devait ensuite se rendre à Melilla, l'autre enclave espagnole située sur la côte méditerranéenne du Maroc.
"Nous allons rétablir l'ordre dans (la) ville et à nos frontières le plus rapidement possible", avait-il déclaré plus tôt lors d'une brève allocution télévisée depuis Madrid.
"Cet afflux soudain de migrants irréguliers est une grave crise pour l'Espagne et pour l'Europe", avait-il ajouté, alors que Ceuta et Melilla sont les seules frontières terrestres entre l'Afrique et l'Union européenne.
Bruxelles a exprimé à l'Espagne sa solidarité et appelé le Maroc, par la voix de la commissaire européenne Ylva Johansson, à empêcher les "départs irréguliers" depuis son territoire.
Selon un journaliste local à Ceuta, les arrivées de migrants, qui s'étaient ralenties à la mi-journée, se sont poursuivies dans l'après-midi.
Sur la plage, où ces migrants arrivent à la nage, les forces de l'ordre espagnoles, qui ont déployé des blindés et utilisé des gaz lacrymogènes, ont mis en place un cordon de sécurité pour les empêcher d'aller plus loin que la rive.
Ils les raccompagnent ensuite vers la clôture qui sépare l'Espagne du Maroc.En milieu d'après-midi, environ 700 migrants, principalement Marocains, mais aussi venus d'Afrique subsaharienne, étaient encerclés sur la plage, selon la même source.
Un journaliste de l'AFP du côté marocain de la frontière a vu des groupes composées de jeunes Marocains, avec des femmes et des enfants, tenter de nouvelles percées à travers le grillage frontalier avant d'être interceptés et chassés par les autorités marocaines.
- "La mort ne me fait pas peur" -
Ces migrants voient dans cette traversée leur unique chance de subsister.
Comme Amal, une jeune déscolarisée de 18 ans qui a veillé toute la nuit avant d'être refoulée mardi à l'aube par les autorités marocaines à Fnideq, ville frontalière de Ceuta."La mort ne me fait pas peur, ce dont j'ai peur, c'est de mourir pauvre ici", a-t-elle dit à l'AFP.
"Je suis venue pour traverser clandestinement et assurer l'avenir de mes enfants, car ici, il n'y a rien.Nous nous aventurons pour traverser: ou je meurs ou je passe", a expliqué pour sa part Ouarda, une mère de deux enfants âgée de 26 ans, divorcée et au chômage, venue de Tétouan (nord).
Le ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a indiqué à la mi-journée que 2.700 des quelque 6.000 migrants arrivés à Ceuta avaient été renvoyés au Maroc.
Lundi, un homme s'est noyé alors qu'il tentait de rallier l'enclave par la mer, selon la préfecture de Ceuta.
- Sahara occidental -
Cette crise migratoire, sans précédent pour l'Espagne, dont le Maroc est un allié clé dans la lutte contre l'immigration clandestine, intervient alors que les relations diplomatiques entre les deux pays se sont envenimées depuis l'accueil, fin avril, par l'Espagne du chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, Brahim Ghali, pour y être soigné du Covid-19.
Selon Isaias Barreñada, professeur de relations internationales à l'Université Complutense de Madrid, cet afflux de migrants n'est "pas un hasard", car des milliers de personnes "n'entrent pas ainsi de façon spontanée" à Ceuta."C'est un message fort" de la part de Rabat, a-t-il dit à l'AFP.
Le Maroc avait convoqué fin avril l'ambassadeur espagnol à Rabat pour lui signifier son "exaspération" et exiger des "explications" après l'hospitalisation du chef du Polisario, un mouvement soutenu par l'Algérie qui revendique l'indépendance du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole que le Maroc considère comme partie intégrante de son territoire.
Si à Rabat, les plus hautes autorités gardent le silence depuis lundi, le directeur central de la police judiciaire, Mohamed Dkhissi, a affirmé dimanche sur la télévision publique marocaine 2M que l'Espagne était "perdante" dans cette brouille et souligné que le Maroc, "qui est une puissance régionale (...) n’est le serviteur d’aucun pays".
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