Doudou Diene : "Une partition de l'Etat libyen est un risque majeur"

Doudou Diene, diplomate, rapporteur spécial des Nations-Unies (2002-2008), fait le point sur l'intervention de la coalition en Libye, au quatrième jour des opérations militaires contre les forces du colonel Kadhafi.Quel est le véritable objectif de l'intervention de la coalition ? Protéger la population libyenne ou renverser le régime de Kadhafi ?L'objectif de la coalition, c'est avant tout de préserver ses intérêts stratégiques et économiques dans la région, et pour cela, il lui faut renverser le régime du colonel Kadhafi. Je ne pense pas que le sort de la population libyenne importe vraiment aux dirigeants occidentaux, ce n'est qu'un prétexte.Mouammar Kadhafi menace la coalition d'un conflit long, il a aussi évoqué l'idée de représailles en Méditerranée�?� A-t-il les moyens de ce qu'il prétend ?Il a encore les moyens de nuire, mais moins qu'avant, et ses possibilités se réduisent. A mon avis, à long terme, il n'a pas les moyens de faire ce qu'il affirme. Il est évident que l'intervention de la coalition l'affaiblit considérablement, et elle réduit son influence.Des manifestations de soutien à Kadhafi ont lieu à Tripoli. Cela veut dire que la population de la capitale le soutient ?Certaines de ces manifestations sont organisées par le pouvoir, mais il ne faut pas nier que le Guide bénéficie d'un certain soutien, difficile à quantifier, notamment parmi la frange la plus pauvre de la population. Il a pris au long de son « règne » un certain nombre de mesures économiques et sociales, dont beaucoup lui sont reconnaissants, malgré le caractère autoritaire du régime. Il ne faut pas négliger l'appui populaire dont il dispose.Le colonel Kadhafi est-il en mesure de rester au pouvoir ?A court terme, cela ne me paraît pas possible. La seule solution pour qu'il puisse se maintenir serait une partition de l'Etat libyen. D'un côté, Tripoli et sa région, la Tripolitaine, resteraient sous son contrôle. La partie orientale du pays, en revanche, autour de Benghazi, serait libérée. C'est selon moi un risque majeur. Propos recueillis par Clémence Mortier.