Un document sensible, alors que le président français Emmanuel Macron se rend jeudi au Rwanda pour apaiser les relations entre les deux pays et clarifier le rôle de la France à l'époque. Michel Rocard devait lire ce texte devant la mission d'information parlementaire présidée par Paul Quilès en 1998, mais avait alors regretté dans la presse n'avoir pas pu le faire durant son audition. L'ancien Premier ministre (1988-1991), décédé en 2016, y révèle ses doutes sur des décisions dont il était écarté par François Mitterrand. Il explique avoir appris "par la presse" la décision d'intervenir au Rwanda en 1990, lorsque le régime de Juvénal Habyarimana sollicite l'aide de la France contre une rébellion d'exilés rwandais venue d'Ouganda. L'accord d'assistance militaire qui lie la France et le Rwanda a été scellé "au cours d'un safari" par (l'ancien président centriste) Valéry Giscard d'Estaing en 1975, raconte-t-il. Pour lui, "le régime (de Juvénal) Habyarimana affiche déjà à l'époque une référence raciste marquée, mais s'il persécute, il tue encore peu".Contrairement à l'approche de François Mitterrand à l'époque, Michel Rocard défend les rebelles rwandais du FPR (alors dirigés par Paul Kagame, aujourd'hui président du Rwanda) qu'il décrit comme "une armée faite de citoyens rwandais exilés" qui s'oppose à un "régime oppresseur", devenu peu à peu "totalitaire mais légalement installé". Sans pouvoir y répondre, Michel Rocard s'interroge enfin sur le rôle exact des "conseillers" militaires français de l'opération Noroît (lancée en octobre 1990 pour évacuer des ressortissants français et étrangers), le rôle de la France dans les accords de paix d'Arusha de 1993 ou encore sur la durée exacte des livraisons d'armes françaises au régime d'Habyarimana, des questions encore ouvertes.Ce document était jusqu'ici resté secret, car la commission de l'historien Vincent Duclert, chargée par Emmanuel Macron de faire la lumière sur le rôle de la France dans le génocide, s'est vu refuser par le bureau de l'Assemblée nationale l'accès aux archives de la mission parlementaire de 1998."Le refus d'accès aux archives de la mission Quilès opposé à la commission est décidément bien troublant", a déploré auprès de Libération Vincent Duclert, regrettant que son équipe ait été "privée de la connaissance du témoignage écrit de l'ancien Premier ministre. Alors même que ce document révèle le questionnement critique d'un ancien chef de gouvernement doublé d'un leader de gauche".Sollicitée par l'AFP, l'Assemblée, présidée par Richard Ferrand, n'a pas fait de commentaires. Son secrétaire général avait répondu à Vincent Duclert que les auditions s'étant tenues à huis clos, leur contenu n'était pas public.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.