"Nous avons pris acte de cette décision, nous la considérons comme injustifiée", a déclaré le chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, lors d'une conférence de presse avec son homologue mauritanien, Ismaël Ould Cheikh Ahmed. Paris a annoncé la réduction du nombre de visas accordés au Maroc, à l'Algérie et à la Tunisie en raison du "refus" de ces pays du Maghreb de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires au retour des immigrés refoulés de France. "Le Maroc a toujours géré la question migratoire et le flux des personnes, avec une logique de responsabilité et d'équilibre entre la facilitation des déplacements des personnes (...) et la lutte contre la migration clandestine", a affirmé M. Bourita. "La décision (de la France) est souveraine. Le Maroc va l'étudier, mais les raisons qui la justifient nécessitent de la précision, un dialogue, car elles ne reflètent pas la réalité", a ajouté le ministre. Ce durcissement de l'octroi des visas aux ressortissants maghrébins survient à moins de sept mois de la présidentielle en France, en plein débat sur l'immigration. "C'est une décision drastique, c'est une décision inédite, mais c'est une décision rendue nécessaire par le fait que ces pays n'acceptent pas de reprendre des ressortissants que nous ne souhaitons pas et ne pouvons pas garder en France", a justifié le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, sur la radio Europe 1. - "Problème franco-français" - La principale pomme de discorde concerne les laissez-passer consulaires (LPC) qui ne sont délivrés qu'au compte-goutte, selon Paris, freinant des expulsions déjà rendues compliquées par la crise sanitaire et les fermetures des frontières. Ainsi, selon le ministère français de l'Intérieur, le Maroc a délivré 138 de ces documents entre janvier et juillet, avec "un taux de coopération" de 25%. "Si ma mémoire est bonne, nos canaux consulaires ont délivré près de 400 laissez-passer pour des personnes se trouvant en situation irrégulière durant les huit derniers mois", a précisé de son côté M. Bourita. "Le Maroc a toujours réagi de manière pragmatique et strict avec les personnes qui se trouvent en situation irrégulière", a-t-il assuré. Le ministre a également attribué à un "problème franco-français" la difficulté du rapatriement des ressortissants marocains, regrettant que la France ne leur impose pas de test PCR avant d'embarquer pour le Maroc, alors que Rabat rend obligatoire ce test pour pénétrer sur son territoire, pandémie oblige. La décision française a également fait réagir la rue marocaine. "C'est une décision surprenante et un instrument de pression (...) Elle est problématique dans la mesure où il y a beaucoup d'étudiants et de touristes marocains qui vont chaque année en France", fustige Mohamed, un étudiant de 28 ans rencontré à Rabat. "Nous considérons cette décision comme une entrave aux Marocains et à leur liberté de circulation telle que stipulée dans les conventions internationales", renchérit Kamal Laghmam, un fonctionnaire de 45 ans. Elle a également été commentée par des médias locaux et les réseaux sociaux. "La France utilise finalement, et très maladroitement, son +arme+ du visa", estime le site marocain PanoraPost. "On attend aujourd'hui la riposte du Maroc à cet acte très inamical (...) et elle sera très certainement politique, diplomatique et bien évidemment économique", avertit ce site d'information généraliste. La France a délivré 18.579 visas en 2021 pour 24.191 demandés par des Marocains, un nombre par ailleurs nettement en baisse. A titre de comparaison, en 2019, c'était 420.000 demandes et 346.000 acceptations. Ni l'Algérie, ni la Tunisie n'ont réagi officiellement à la décision française jusqu'à présent. Mais des internautes en Algérie ont vivement dénoncé la mesure. "Le langage de la menace témoigne de la mentalité colonialiste persistante des dirigeants français", a commenté un lecteur. isb-ko-hr-agr/ezz/vl
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