Ces œuvres d'art, des statues totem de l'ancien royaume d'Abomey ainsi que le trône du roi Béhanzin, pillés lors de la mise à sac du palais d'Abomey par les troupes coloniales en 1892, font l'objet d'une exposition spéciale dans le musée parisien où elles faisaient jusqu'à présent partie des collections.
Une série de colloques sur le patrimoine du Bénin, des concerts et un cycle de cinéma sont organisés en parallèle.
Deux conservateurs du Bénin sont en France depuis plus d'une semaine pour organiser le retour des œuvres, "demandé par le Bénin", a précisé à l'AFP Emmanuel Kasarhérou, président du musée du Quai Branly-Jacques Chirac, pour qui cette restitution est "une première réalisation" issue "d'un long travail de recherches".
Au Bénin, où la date exacte de leur retour n'est pas encore connue, elles iront d'abord "dans un lieu de stockage.Puis elles seront présentées dans d'autres lieux de manière pérenne: à l'ancien fort portugais de Ouidah et la maison du gouverneur, lieux historiques de l'esclavage et de la colonisation européenne, situés sur la côte, en attendant la construction d'un nouveau musée à Abomey", dans l'ancien palais royal des rois du Dahomey, dans les terres, a ajouté M. Kasarhérou.
Selon des experts, 85 à 90% du patrimoine africain serait hors du continent.Depuis 2019, outre le Bénin, six pays - Sénégal, Côte d'Ivoire, Ethiopie, Tchad, Mali, Madagascar- ont soumis des demandes de restitutions.
Au moins 90.000 objets d'art d'Afrique sub-saharienne sont dans les collections publiques françaises.70.000 d'entre elles au Quai Branly, dont 46.000 arrivées durant la période coloniale.
- Retracer l'origine -
Le Quai Branly a entamé un long "travail quasi-exhaustif sur les 300.000 œuvres du musée qui ne concernent pas que l'Afrique (Océanie, Asie et Amériques aussi) pour identifier celles qui auraient été prises de manière violente sans le consentement des propriétaires, par des prises de guerre ou par des coercitions de l'administration coloniale", dit M. Kasarhérou.
Le 28 novembre 2017, à Ouagadougou, le président français Emmanuel Macron avait annoncé la mise en œuvre dans un délai de cinq ans de restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain, reconnaissant l'anomalie que constitue sa quasi-absence en Afrique subsaharienne.
Cela a été rendu possible par une loi votée le 24 décembre 2020, permettant des dérogations au principe d'"inaliénabilité" des œuvres dans les collections publiques, parce qu'elles avaient fait l'objet de pillages caractérisés.
Un rapport confié aux universitaires français et sénégalais, Bénédicte Savoy et Felwine Sarr, publié en 2018, avait dressé un calendrier de restitutions et un inventaire des dizaines de milliers d'objets que les colons ont ramené d'Afrique.
Il proposait aussi un changement du code du patrimoine pour faciliter leur retour quand les Etats africains en feraient la demande.
Ce rapport avait été salué mais aussi critiqué par certains directeurs de musées, soucieux de la "circulation des œuvres" au "caractère universel".
M. Kasarhérou salue "l'examen de conscience", impulsé par ce rapport.Néanmoins, ajoute-t-il, si "la question de la provenance des œuvres est une question centrale", elle doit être soumise à un "très gros travail préalable afin de vérifier leur origine et dans quelles conditions elles ont rejoint les collections nationales", ce qui est souvent "très difficile".
"Tous les objets qui sont dans les collections en Europe n'ont pas été volés, c'est peut-être l'idée qui court actuellement mais elle n'est pas juste du point de vue historique.Dans quelle proportion ? C'est tout l'objet de notre travail", souligne-t-il.
Beaucoup d'objets sont en effet passés entre plusieurs mains: des administrateurs, médecins, militaires, ou leurs descendants en ont fait don aux musées.
D'autres œuvres ont été offerts à des religieux, acquises par les collectionneurs d'art africain au début du XXe siècles, ou encore ramenées lors d'expéditions scientifiques.
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