Ethiopie: les rebelles menacent de marcher sur la capitale, un émissaire américain envoyé

Infos. L'émissaire américain pour la Corne de l'Afrique va se rendre jeudi et vendredi en Ethiopie pour appeler à une solution pacifique dans le pays, où des groupes rebelles menacent de marcher sur la capitale Addis Abeba.

Ethiopie: les rebelles menacent de marcher sur la capitale, un émissaire américain envoyé
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Addis Abeba (AFP)

Les rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui affrontent l'armée depuis an dans le nord du pays, ont affirmé ce week-end avoir pris les villes de Dessie et Kombolcha, situées à un carrefour routier stratégique à 400 kilomètres au nord d'Addis Abeba.

Dans le même temps, l'Armée de libération oromo (OLA), groupe rebelle allié au TPLF, a annoncé s'être emparé de localités plus au sud, le long de l'autoroute menant à Addis Abeba.

"Si les choses continuent dans la dynamique actuelle, alors (la prise d'Addis Abeba) est une question de mois, si ce n'est de semaines", a déclaré mercredi à l'AFP le porte-parole de l'OLA, Odaa Tarbii, assurant que la chute du Premier ministre Abiy Ahmed est "courue d'avance".

Cette déclaration fait écho à celles d'un porte-parole du TPLF, Getachew Reda, qui avait affirmé en juillet à l'AFP: "S'il faut marcher sur Addis pour protéger le Tigré, nous le ferons".

Le gouvernement dément toute progression rebelle mais a décrété mardi l'état d'urgence sur l'ensemble du territoire, tandis que les autorités d'Addis Abeba demandaient aux habitants de s'organiser pour défendre la ville.

Les communications sont coupées dans une grande partie du nord de l'Ethiopie et l'accès des journalistes est restreint, rendant difficile toute vérification indépendante des positions sur le terrain. 

L'escalade des derniers jours inquiète la communauté internationale.

"Les Etats-Unis sont de plus en plus préoccupés par l'ampleur croissante des opérations de combat et des violences intercommunautaires", a déclaré mercredi un porte-parole de la diplomatie américaine en annonçant la visite jeudi et vendredi dans le pays de son émissaire pour la Corne de l'Afrique, Jeffrey Feltman.

- Détentions -

Mercredi, Abiy Ahmed a accusé l'alliance rebelle de "détruire le pays" et de transformer l'Éthiopie en Libye ou en Syrie.

A Addis Abeba, des habitants inquiets affirmaient mercredi leur soutien au gouvernement."Ce sont des ennemis de l'Éthiopie, ils doivent (être) écartés et pour cela, nous devons tous coopérer avec l'état d'urgence", estime Azmeraw Berhan, un travailleur indépendant.

Dans le cadre de l'état d'urgence, les autorités pourront enrôler "tout citoyen en âge de combattre et possédant une arme", ou suspendre des médias soupçonnés d'"apporter un soutien moral direct ou indirect" au TPLF, selon le média d'Etat Fana Broadcasting Corporate.

Getachew Reda a qualifié ces mesures de "carte blanche pour emprisonner ou tuer des Tigréens".

Deux avocats traquant les détentions arbitraires de Tigréens ont affirmé mercredi à l'AFP avoir reçu des informations faisant état de dizaines de personnes arrêtées par la police à Addis Abeba depuis l'annonce de l'état d'urgence.

Débuté en novembre 2020, le conflit au Tigré connaît un spectaculaire revirement ces derniers mois.

Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix 2019, avait proclamé la victoire le 28 novembre, après avoir envoyé l'armée dans la région pour destituer les autorités dissidentes issues du TPLF qu'il accusait d'avoir attaqué des bases militaires fédérales.

Mais en juin, les combattants pro-TPLF ont repris l'essentiel de la région.Le gouvernement a alors retiré ses troupes et déclaré un cessez-le-feu unilatéral le 28 juin, mais les rebelles ont poursuivi leur offensive dans les régions voisines de l'Afar et de l'Amhara.

- "Crimes contre l'humanité" -

La période du 3 novembre au 28 juin a été marquée par de nombreuses exactions dont "certaines peuvent constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité", estiment le Haut Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme et la Commission éthiopienne des droits de l'homme dans une enquête conjointe rendue publique mercredi.

Ce rapport évoque notamment exécutions extra-judiciaires, torture, enlèvements, violences sexuelles -dont des viols collectifs sur des femmes et des hommes- et pillages. 

Le Haut-Commissariat a indiqué avoir également recensé des abus commis après la période couverte par l'enquête, notamment la mort en septembre de 47 civils dans le village amhara de Chenna, tenu par le TPLF.

Abiy Ahmed a souligné que ce rapport n'établissait aucune preuve d'un génocide au Tigré, mais la Haut-commissaire aux droits de l'homme Michelle Bachelet a répondu que l'enquête n'avait pas permis ni d'établir, ni d'écarter ces accusations qui nécessitent une enquête plus approfondie.

Les douze mois de conflit ont également plongé le nord de l'Ethiopie dans une grave crise humanitaire, avec plusieurs centaines de milliers de personnes au bord de la famine. 

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