Adama Barrow, dont l'accession à la présidence il y a cinq ans avait mis fin à plus de 20 années de dictature, a recueilli plus de 53% des voix, selon les résultats diffusés par la commission électorale dimanche, au lendemain d'un vote crucial pour une jeune démocratie qui cherche à surmonter son passé dictatorial.
Son principal concurrent Ousainou Darboe a obtenu 27,7% des suffrages.
Le président de la commission, Alieu Momarr Njai, a déclaré devant la presse Adama Barrow "dûment élu pour servir en tant que président de la République de Gambie".
Des foules de partisans ont défilé une partie de la nuit dans un grand vacarme de klaxons et de cornes dans les rues de la capitale.Ils ont dansé sur une vaste esplanade et ovationné Adama Barrow quand celui-ci leur a adressé la parole pour endosser la victoire "avec un grand sentiment de joie et d'humilité", et les appeler à "respecter" les électeurs de ses concurrents.
L'élection, qui se jouait sur un tour, a été "libre juste et transparente", a-t-il assuré.
Mais ses adversaires ont dit contester ces résultats et se réserver "tous les moyens d'action".
"Pour le moment, nous rejetons les résultats jusqu'à présent annoncés" par la commission, a dit devant la presse Ousainou Darboe, aux côtés de deux autres de ses concurrents.
"Tous les moyens d'action sont sur la table", a-t-il ajouté, appelant "tous les Gambiens à rester calmes et pacifiques" le temps que des investigations soient réalisées.Les représentants de ces candidats présents au moment des opérations de comptage ont constaté "un certain nombre de problèmes", a-t-il dit.
Les Gambiens se sont pressés en masse dans les isoloirs samedi, produisant un taux de participation d'environ 87% selon les résultats officiels.
Environ un des deux millions de Gambiens étaient appelés à choisir parmi six candidats, tous des hommes, celui qui dirigera pendant cinq ans le plus petit pays d'Afrique continentale, qui est aussi l'un des plus pauvres du monde.Près de 860.000 ont pris part au vote.
Cinq ans après la fin de la dictature, la consolidation de la démocratie est un des enjeux de ce scrutin.Le sort de l'ancien dictateur Yahya Jammeh et la crise économique en sont d'autres.
Près de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté.La Gambie a été durement touchée par le Covid-19, qui a tari les flux de touristes, une des premières sources de revenus du pays avec l'agriculture.
La communauté internationale sera attentive à l'acceptation ou la contestation par les perdants des résultats officialisés par la commission, a dit un diplomate étranger de haut rang, parlant de "moment capital".
La Communauté des Etats ouest-africains (Cédéao), un acteur majeur dans la crise post-électorale de 2015 et le départ contraint du dictateur Jammeh, avait exhorté dans un communiqué "tous les candidats à accepter de bonne foi l'issue de cette élection qui n'aura ni gagnant, ni perdant, mais un seul vainqueur, le peuple gambien".
Il y a cinq ans, M. Barrow, un ancien promoteur immobilier aujourd'hui âgé de 56 ans et alors quasiment inconnu, avait déjoué les pronostics et battu le dictateur Jammeh après plus de vingt ans de régime caractérisé par une multitude d'atrocités commises par l'Etat et ses agents: assassinats, disparitions forcées, viols, tortures, etc.
- Crise économique -
M. Jammeh, qui refusait de reconnaître sa défaite, a été forcé de s'exiler en Guinée équatoriale sous la pression d'une intervention militaire ouest-africaine.
La présidentielle de 2021 est la première sans lui depuis 1996.
Adama Barrow revendique le retour des libertés, la construction de routes et de marchés et la pacification des relations avec la communauté internationale.
Ousainou Darboe, un avocat de 73 ans, quatre fois deuxième derrière Yahya Jammeh à la présidentielle, accusait M. Barrow d'avoir manqué à tous ses engagements pour rester au pouvoir.
M. Barrow est revenu sur sa promesse initiale de ne rester que trois ans au pouvoir.Il a beaucoup atténué ses précédents engagements à poursuivre les responsables de crimes commis sous Yahya Jammeh.
Son parti nouvellement créé a au contraire noué une alliance avec celui de l'ancien autocrate.
Le prochain président devra décider s'il suit ou non les recommandations d'une commission chargée d'enquêter sur la période Jammeh, qui a demandé que les responsables des crimes commis à cette époque soient jugés.
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