"La justice relative au génocide est un enjeu politique majeur pour ceux qui gouvernent aujourd'hui au Rwanda", a lancé Me Françoise Mathe, visant le régime du président Paul Kagame, qui dirigea la rébellion tutsi du FPR (Front patriotique rwandais), au pouvoir depuis la fin du génocide en juillet 1994. "L'entretien méticuleux de la culpabilité collective internationale" vis-à-vis du génocide est "le gage de survie de Kigali", a-t-elle asséné. "Ce que l'on attend à Kigali, c'est la mise en récit d'une histoire officielle, et celui qui n'accepte pas cette mise en récit, qui s'éloigne de cette doxa, est traité de négationniste", a-t-elle dit. Claude Muhayimana, 60 ans, ancien chauffeur d'hôtel à Kibuye (ouest du Rwanda), est jugé depuis le 22 novembre devant les assises de Paris pour complicité de génocide, accusé d'avoir transporté des tueurs sur des lieux de massacre de Tutsi. "Je n'ai pas entendu la vérité, et je pense que vous aurez beaucoup de mal à la trouver, sur ce qui s'est passé à Kibuye entre avril et juillet 1994, sur le rôle de Claude Muhayimana, sur sa responsabilité", a lancé Me Mathe aux jurés. "Dire qu'un homme a commis le crime des crimes entre le 7 avril et la fin juin 1994 sans essayer de fixer le moindre repère temporel -on le met dans plusieurs endroits le même jour à la même heure... J'ai tendance à penser qu'on est parfois plus prudent avec des braqueurs!", a poursuivi l'avocate. "Je cherche toujours la preuve dans ce dossier", a-t-elle dit. Des dizaines de témoins, parmi lesquels des rescapés ainsi que des génocidaires condamnés et détenus au Rwanda, ont été entendus pendant le procès, et nombre d'entre eux ont dit avoir vu l'accusé transporter des miliciens hutu Interahamwe et des gendarmes chantant "exterminons-les!" et brandissant leurs machettes. Le génocide des Tutsi du Rwanda, orchestré par le régime hutu, a fait plus de 800.000 morts entre avril et juillet 1994. Quinze ans de réclusion ont été requis mercredi matin contre Claude Muhayimana, cantonnier à Rouen (nord-ouest), qui comparaît libre. L'accusation a estimé qu'il était "un maillon", un "rouage indispensable" qui ne "pouvait ignorer" les objectifs funestes des miliciens qu'il transportait. Le verdict est attendu jeudi.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.