Une emprise plus ou moins directe sur les mines d'or est déjà imputée dans le nord du Mali à des groupes armés, y compris jihadistes, qui trouveraient une source de financement, voire de recrutement, dans le boom aurifère entre Sahara et Sahel. Mais le risque d'un tel développement a rarement été soulevé au Sénégal, frontalier du Mali. Dans un rapport commun publié jeudi, le Centre des hautes études de défense et de sécurité (CHEDS) et l'Institut d'études de sécurité (ISS) écrivent que les localités aurifères sénégalaises de Kédougou et Tambacounda (est) "recèlent des vulnérabilités qui sont instrumentalisées par ces groupes dans leurs stratégies de contrôle des espaces et des circuits d'approvisionnement dans la zone sahélienne". L'étude est d'autant plus significative que le CHEDS est un établissement public censé fournir à l'Etat une expertise stratégique. Tout en affectant des moyens de défense particuliers à l'est du pays frontalier du Mali, les autorités sénégalaises sont généralement discrètes sur la menace extrémiste et le danger d'une propagation jihadiste. "L'absence de traçabilité des ressources qui financent l'activité aurifère et de celles qui découlent de la commercialisation de l'or alimente les risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme", disent les deux organismes basés à Dakar. Ils soulignent "le sentiment d'exclusion des populations, résultant de la précarité socio-économique de la zone qui contraste avec la richesse de son sous-sol". Ce fossé les rend "vulnérables au recrutement par les groupes extrémistes", disent-ils. Ils mettent en gardent contre les "flux massifs et incontrôlés" de personnes et d'argent, qui "accentuent le risque d'infiltration et d'implantation d'éléments extrémistes". Ces vulnérabilités sont renforcées par le "caractère largement informel, voire clandestin, de l'orpaillage et les failles dans la commercialisation de l'or", disent-ils. Le Sénégal partage une frontière longue de 480 km avec le Mali, pays pauvre et enclavé livré aux agissements de groupes affiliés à Al-Qaïda et à l'organisation Etat islamique, et aux violences de toutes sortes perpétrées par des milices autoproclamées d'autodéfense et des bandits. Les forces régulières sont elles-mêmes accusées d'exactions.
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