"Sanchez, traître", "Les Sahraouis décident, ils ne sont pas votre monnaie d'échange", "Le Sahara ne se vend pas": de nombreuses pancartes fustigeaient la décision du Premier ministre socialiste Pedro Sanchez de soutenir tout à coup le plan défendu par Rabat sur le territoire disputé du Sahara occidental, et mettre ainsi fin à une brouille diplomatique de près d'un an. "C'est la dernière trahison perpétrée par le gouvernement espagnol", a déploré Pablo Marin, 63 ans, au milieu de drapeaux sahraoui, mais aussi de drapeaux du parti de gauche radicale Podemos, pourtant allié du gouvernement dans la coalition au pouvoir. Affichant jusqu'ici sa neutralité, Madrid a annoncé publiquement il y a huit jours son soutien au plan d'autonomie marocain pour le Sahara occidental, un vaste territoire désertique riche en phosphates et aux eaux très poissonneuses, qui oppose Rabat au Front Polisario, soutenu par Alger, depuis le départ des Espagnols en 1975. Cette annonce fracassante intervient après une crise diplomatique, déclenchée en avril 2021 par l'accueil en Espagne, pour y être soigné du Covid-19, du chef du Front Polisario, Brahim Ghali, ennemi juré de Rabat. Son point culminant avait été, un mois plus tard, l'arrivée de quelque 10.000 migrants d'origine marocaine en quelques heures dans l'enclave espagnole de Ceuta, sur la côte nord du Maroc, à la faveur d'un relâchement de la surveillance des frontières côté marocain. Venus de toute l'Espagne, les manifestants étaient environ 2.000 samedi à Madrid, selon les autorités locales. Fatma Hamida, étudiante de 20 ans, est venue de Zamora, en Castille-et-Léon (nord-ouest) pour s'opposer à "une décision de Pedro Sanchez et manifester pour notre liberté, notre droit d'avoir un territoire à nous". "En colère", Salome Brahim, un commercial de 28 ans venu de Valladolid, estime que les Sahraouis ont été "la monnaie d'échange face aux intérêts du royaume marocain". "Personne ne sait pourquoi" l'Espagne a brutalement changé de position, et "c'est bien ça le problème", explique-t-il, alors que depuis près d'une cinquantaine d'années et le départ des Espagnols, Madrid était restée neutre. Le conflit du Sahara occidental, considéré comme un "territoire non autonome" par l'ONU, oppose depuis des décennies le Maroc aux indépendantistes du Front Polisario soutenus par Alger. Rabat, qui contrôle près de 80% de ce territoire, propose un plan d'autonomie sous sa souveraineté tandis que le Polisario réclame un référendum d'autodétermination, prévu lors de la signature en 1991 d'un cessez-le feu mais jamais concrétisé.
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