Rien ne signale de l'extérieur sa petite échoppe --quatre murs en parpaings apparents et décatis surmontés d'un toit de tôle ondulée-- en contrebas d'une route du quartier populaire de Nkolndongo. Mais elle ne désemplit plus et, depuis que la Russie a envahi l'Ukraine il y a plus d'un mois, ses clients, qu'il ne fournit que sur commandes, sont passés d'une vingtaine à une cinquantaine selon lui. Une douce odeur sucrée s'échappe d'un petit four à pain rudimentaire. L'artisan pétrit, malaxe, et moule des pains réalisés uniquement à base de denrées "made in Cameroun", s'enorgueillit Guy Marcel. Le Cameroun, comme nombre d'autres pays sur le continent ou ailleurs, est affecté par la guerre entre Russie et Ukraine, respectivement premier et quatrième exportateur mondial de blé, une denrée dont les cours flambent depuis le début de la guerre. La Russie été accusée mardi devant le Conseil de sécurité de l'ONU d'avoir provoqué une "crise alimentaire mondiale", voire de faire courir des risques de "famine" à travers le monde, avec sa guerre en Ukraine, le "grenier à blé de l'Europe". -bouche à oreille- Le pain du boulanger de 44 ans a le même aspect que celui fait avec la farine de blé mais il est plus lourd et plus consistant en bouche. Et le goût, légèrement sucré. "Je m'en sors très bien avec la farine locale", assure M. Nganta. Car s'il ne peut vendre sa baguette plus chère ou moins chère que ses concurrents en raison d'un prix fixé par l'Etat, au moins leur coût de production est moindre et donc ses bénéfices plus importants. Il assure gagner pour chaque baguette entre 50 et 60 francs CFA (7 à 9 centimes d'euro) quand celle au blé n'en rapporte que 40. Le prix de 50 kg de farine de blé est passé de 19.000 francs CFA (environ 30 euros) en 2021, à 24.000 francs aujourd'hui, soit 36 euros, contre 20.000 francs (près de 30 euros) pour la farine de patates douces et 17.500 (environ 26 euros) pour le manioc. C'est le bouche à oreille qui a permis à l'artisan boulanger de voir sa clientèle plus que doubler ces dernières semaines. "Le goût est vraiment différent pour le pain made in Cameroon et ça remplit plus le ventre", s'enthousiasme Lewis Ateba, un électrotechnicien qui sort de l'échoppe avec plusieurs baguettes. Dans ce vaste pays d'Afrique centrale d'environ 25 millions d'habitants, dont le quart vit dans l'extrême pauvreté selon la Banque mondiale, le prix de la baguette était imposé par l'Etat à 125 francs CFA (20 centimes d'euro) depuis 13 ans, il est passé à 150 francs (23 centimes d'euro) le 16 mars, soit près de 20% plus cher, ce qui a immédiatement provoqué mécontentement et inquiétude. "Nous souffrons ! 150 francs pour du pain c'est trop, nous sommes fâchés", se plaint une enseignante, Madeleine Ngwet, sur un marché de Douala, la capitale économique du Cameroun.
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