Le 30 novembre, l'aviation et l'artillerie ougandaises bombardaient, dans les provinces congolaises du Nord-Kivu et de l'Ituri, de présumés bastions des Forces démocratiques alliées (ADF), mouvement accusé de terribles massacres dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) et de récents attentats jihadistes en Ouganda.
Quelques heures après, les troupes de Kampala pénétraient en RDC, devant des habitants partagés entre espoir d'en finir avec les atrocités et inquiétude sur les intentions du voisin ougandais, accusé d'avoir largement contribué à la déstabilisation de leur pays depuis un quart de siècle.
Globalement, ces troupes et leurs blindés étaient bien accueillis.
"Nous avons beaucoup aimé au départ la mutualisation des forces", déclare à l'AFP en Ituri Jackson Akilimali, un jeune homme qui a dû fuir son village de la chefferie de Walese Vonkutu, en territoire d'Irumu, et vit provisoirement dans une famille d'accueil dans la localité de Komanda.
"Mais, jusqu'à aujourd'hui, je n'ai vu chez nous aucun militaire ougandais et entre-temps les civils sont toujours tués", dit-il.Comme dans la nuit du 24 au 25 janvier, quand plus d'une dizaine de personnes sont mortes dans une attaque attribuée aux ADF.
"Depuis qu'ils ont dit qu'ils allaient traquer les rebelles nous ne voyons rien sur le terrain", appuie Kasuta Mulemberi, habitant du village de Luna, dans le même secteur.
- Bombardements dans les forêts -
"C'est une désolation", disait aussi la semaine dernière Dieudonné Malangay, vice-président de la société civile de Walese Vonkutu, mais "nous avons encore de l'espoir; nous demandons aux forces ougandaises d'intensifier aussi les opérations du côté Ituri" avec l'armée de RDC.
Dans la province voisine du Nord-Kivu, des habitants du territoire de Beni, particulièrement affecté par les exactions des ADF, expriment aussi leur frustration.
"Il y a des mouvements de militaires ougandais sur la route" traversant le parc des Virunga, constate David Moaze, coordonnateur de l'"Action pour la défense des droits de l'homme" (Addho) à Nobili, à la frontière ougandaise.
Peu après leur arrivée en RDC, les militaires ougandais, dont le nombre n'a jamais été précisé jusqu'à présent, avaient fait venir des engins de terrassement pour refaire des portions trop détériorées de cette route.Depuis, d'autres travaux du même genre sont lancés dans d'autres secteurs.
"Nous entendons aussi des bombardements dans les profondeurs du parc et dans les forêts", ajoute David Moaze."Mais dire qu'il y a des avancées significatives, ce n'est pas vrai", dit-il, constatant que les villageois déplacés ne peuvent toujours pas rentrer chez eux ni cultiver leurs champs.
Kambale Kasombolwa, chauffeur de taxi, reconnaît qu'une partie de la route est sécurisée par les militaires.Mais sur une autre portion, "c'est le calvaire", dit-il, "des chauffeurs de taxi ont été tués sur cette route depuis le début des opérations conjointes".
- Demain ou après-demain, la paix -
Les "trois forces" présentes dans la région - armée de RDC (FARDC), armée ougandaise (UPDF) et force de l'ONU (Monusco) "doivent conjuguer leurs efforts, pour nous donner l'assurance que demain ou après-demain nous aurons la paix", réclame David Moaze.
Lors d'une réunion le 22 janvier en territoire de Beni, des commandants des FARDC, de l'UPDF et de la Monusco ont "échangé sur la responsabilité (de chacun) dans les opérations de traque des terroristes"."L'essentiel est de savoir qui fait quoi et dans quelle zone précisément", expliquait Antony Mualushayi, porte-parole des FARDC dans la région de Beni.
En attendant, "nous continuons à compter les morts!", s'emporte Darius Syahera, rapporteur de la société civile du territoire.
"Le bilan de la mutualisation" entre FARDC et UPDF est "largement positif", affirme de son côté à l'AFP le lieutenant Jules Ngongo, porte-parole des FARDC en Ituri."Nous menons des opérations, il y a des arrestations de ces hors-la-loi qui n'ont plus la liberté de circulation.Nous avons réduit leur capacité de nuisance", assure-t-il.
Le 12 janvier, les deux armées annonçaient l'arrestation d'un des fondateurs des ADF.Et fin janvier, un "jihadiste" recherché par le Kenya et lié aux ADF, selon l'armée de RDC, était appréhendé.
"D'autres ont également été neutralisés au combat", assurait lundi le général Sylvain Ekenge, porte-parole du gouverneur militaire du Nord-Kivu.
Depuis fin novembre, "des bastions et retranchements des ADF sont passés sous contrôle de l'armée", complète le lieutenant Ngongo, ce qui a permis "que l'ennemi soit aujourd'hui aux abois et en errance".
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