Dans ce pays ultra-fan de ballon rond, l'amour du football transcende les divisions et le pays tout entier a semblé vibrer à l'entame de l'équipe nationale dans une compétition qu'elle attend sur son territoire depuis cinquante ans.
Dès les premières heures de la matinée, la capitale Yaoundé était en effervescence.La foule a afflué vers la nouvelle enceinte d'Olembé à peine terminée, au son des klaxons et des vuvuzelas.
Ils étaient des milliers en jaune, rouge, vert, les couleurs du Cameroun, à rêver d'un ticket pour admirer leurs idoles et entrer dans le stade construit pour la compétition et rempli seulement à 80%, la jauge fixée par la Confédération Africaine de Football (CAF), covid et nouvelle vague d'Omicron obligent.
- Vaccin et test négatif obligatoires -
Et des conditions très draconiennes n'ont pas refroidi les ardeurs.Pour entrer au stade durant cette CAN, il faut cumuler un cycle complet de vaccination et un test PCR négatif de moins de 72 heures ou antigénique de 24h...dans un pays où la grande majorité de la population ignore ostensiblement le port du masque et est très réfractaire au vaccin.Seuls 6% des plus de 18 ans sont officiellement vaccinés.
Dans tout le pays, surnommé "Afrique en miniature" en raison notamment de ses nombreux groupes ethniques, des fan-zones ont été improvisées pour soutenir l'équipe nationale et des dizaines de personnes se sont regroupées dans des bars où des écrans avaient été installés pour l'occasion.
A Douala, la capitale économique, l'ambiance s'est cependant brutalement refroidie à l'ouverture du score par le Burkina Faso.Mais la confiance est revenue après l'égalisation et tous les bars de la ville ont explosé au second but du Cameroun.
Même enthousiasme à Buea, pourtant située dans l'ouest anglophone en proie à un sanglant conflit séparatiste depuis cinq ans.Dans les deux régions Sud-Ouest et Nord-Ouest, où vit l'essentiel de la minorité anglophone d'un pays majoritairement francophone, les groupes armés séparatistes et les forces de sécurité dépêchées par Yaoundé s'affrontent dans un conflit meurtrier qui a fait plusieurs milliers de morts et déplacé des centaines de milliers de personnes.
- "Facteur de paix" -
"Le football, c'est un facteur de paix et d'unité.Cette compétition est une chance de se remettre tous ensemble et de construire la paix pour l'avenir", s'enthousiasme Ekane Ndale, un fonctionnaire venu voir avec quelques dizaines de personnes le match dans un club de football local de Buea.
"Mon pays, c'est le Cameroun, c'est lui que je soutiens et nous sommes tous très heureux de le voir gagner, en particulier ici à Buea", se réjouit George Mua Anang."Le Cameroun, c'est une seule patrie et nous souhaitons que cet événement apporte la paix dans cette région", abonde Christian Etolo, un policier francophone.
Pour l'indéboulonnable président Paul Biya, 88 ans dont près de 40 au pouvoir, qui refuse toute négociation avec les séparatistes et a lancé ses forces de sécurité dans une implacable répression visant les séparatistes mais aussi l'opposition dans tout le pays, l'organisation de la CAN est une opportunité pour ressouder le pays derrière lui.
Il a profité de la cérémonie d'ouverture pour faire l'une de ses très rares apparitions publiques, alors que des rumeurs insistantes circulent depuis des années sur son état de santé fragile et questionnent sa capacité à diriger le pays.Il a reçu l'ovation de la foule lors d'un tour d'honneur, du toit ouvrant d'un SUV blindé, au côté de son épouse Chantal Biya.
"Le président Biya s'est toujours servi du football comme instrument politique pour rassembler les Camerounais et surfer sur leurs succès", rappelle Jean-Bruno Tagne, auteur de la "Tragédie des Lions indomptables"."Selon lui, les Camerounais doivent être à l'image des Lions indomptables, unis et indivisibles", conclut-il.
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