Brandissant des pancartes "we shall overcome" ("nous vaincrons") ou "we are united not divided" ("nous sommes unis, pas divisés"), entre 2.000 et 3.000 manifestants se sont rassemblés devant le théâtre municipal sur l'avenue Bourguiba, l'artère principale de Tunis, selon des journalistes de l'AFP. "Le peuple veut ce que tu ne veux pas", clamaient les manifestants à l'adresse du président Kais Saïed, en réclamant "le respect de la Constitution et le retour à la démocratie". Après des mois de blocage politique, M. Saied s'est arrogé le 25 juillet les pleins pouvoirs en suspendant les activités du Parlement. Depuis, même s'il a formé un gouvernement, il dirige le pays par décrets. Dans une nouvelle étape franchie fin mars, il a dissous le Parlement et changé la composition du Conseil supérieur de la magistrature et de l'autorité électorale Isie. Sous la pression de ses opposants qui dénoncent "un coup d'Etat" et de la communauté internationale, inquiète d'une dérive autoritaire dans le berceau du Printemps arabe, M. Saied a annoncé une feuille de route prévoyant un référendum sur la Constitution le 25 juillet et des élections législatives le 17 décembre. Dimanche, la foule était moins dense qu'espéré alors que le Front du salut national, constitué le 26 avril autour du vétéran de gauche Ahmed Nejib Chebbi, pensait attirer de nouveaux soutiens au camp anti-Saied. Celui-ci est mené depuis des mois par le parti d'inspiration islamiste Ennahdha et le mouvement Citoyens contre le coup d'Etat du juriste Jahouar Ben Mbarek. L'automne dernier, ces formations avaient mobilisé jusqu'à 6 ou 7.000 manifestants. Salah Tzaoui, un instituteur de 57 ans, interrogé par l'AFP, s'est dit "un peu déçu de l'affluence". Il s'attendait "à plus de gens" car beaucoup ont, comme lui qui a participé en 2019 aux comités de soutien à Kais Saied, "un sentiment de trahison complète". Il note la forte présence des plus de 40 ans: "Ce sont ceux qui ont connu la dictature (de Zine El Abidine Ben Ali, ndlr) et ne veulent plus de ça". Non loin, Khaled Benabdelkarim, autre enseignant de 60 ans, a aussi voté pour Kais Saied, un professeur de droit constitutionnel élu par surprise en 2019. Pour lui, le président "a trahi le peuple, volé la démocratie. Il n'a pas ni projet politique ni projet économique, à part la soumission aux puissances étrangères". Outre l'impasse politique, la Tunisie s'enfonce dans une grave crise économique avec une croissance atone, un chômage élevé, une inflation galopante accentuée par la guerre en Ukraine et un surendettement qui l'a poussée à demander un nouveau prêt au FMI.
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