Des islamistes marocains se disent rassurés par le fait qu'il n'y ait pas eu d'arrestations massives et "aveugles" après l'attentat meurtrier du 28 avril à Marrakech, comme cela avait été le cas au lendemain des attentats de 2003.
"Il n'y a pas pour l'instant de réaction aveugle et c'est rassurant", dit Nadia Yassine, du mouvement islamiste Justice et bienfaisance, l'un des plus importants au Maroc, interdit mais toléré par les autorités.
Près d'une semaine après l'attentat de Marrakech qui a fait 16 morts sur la touristique place Jamâa El-Fna, il n'y a officiellement pas eu d'arrestation.Et s'il n'a pas été revendiqué, les autorités montrent du doigt Al-Qaïda.
Nadia Yassine se souvient en revanche de "coups de filet à l'aveuglette en 2003"."Ils avaient ramassé un peu tout le monde, dans les mosquées", dit-elle.Après les attaques kamikazes à Casablanca en mai 2003 qui avaient fait 45 morts dont les 12 kamikazes, des centaines d'islamistes avaient été placés derrière les barreaux.
"Le roi est impliqué dans un processus progressiste, tout le monde a envie d'avancer", dit Nadia Yassine.Son mouvement avait très vite condamné l'attentat de Marrakech et demandé que "les atteintes aux droits de l'homme qui ont suivi les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca ne se reproduisent pas".
Le jour même de l'attentat de Marrakech, Mohammed VI a appelé à respecter "la primauté de la loi" et à oeuvrer à "la préservation de la quiétude et de la sécurité des personnes et des biens".
En plein "printemps arabe" après des manifestations pour des changements politiques, le roi a annoncé en mars des réformes constitutionnelles.Le 14 avril, il a libéré de nombreux détenus politiques dont des islamistes.
"Au début, on avait des craintes qu'il y ait un recul par rapport aux droits de l'homme (...) mais je crois qu'elles ne sont plus de mise", affirme Sâad-Eddine Othmani, député et membre dirigeant du parti Justice et développement (PJD, opposition islamiste représentée au Parlement). "Je crois qu'on est à un point de non-retour au Maroc et que plus personne n'acceptera des dépassements ou des arrestations injustifiées", poursuit-il.
Le politologue spécialiste de l'islamisme Mohamed Darif se félicite aussi qu'on n'ait "pas commis les erreurs des attentats de 2003"."Il y a eu cette campagne d'arrestations illégales et on a bien compris la leçon", dit-il.
L'attentat de Marrakech a été condamné par les islamistes du PJD et de Justice et bienfaisance, qui dénoncent traditionnellement la violence.
Les salafistes, aussi, ont fait entendre leur voix: "C'est un acte de folie perpétré par des personnes qui ne croient à aucune religion", a dit au quotidien Aujourd'hui Le Maroc le cheikh Mohamed Fizazi qui a bénéficié de la grâce royale du 14 avril après avoir été condamné à 30 ans de prison suite aux attentats de Casablanca.
Dans une vidéo sur internet, de jeunes salafistes en prison affirment être "victimes" de l'attentat de Marrakech.Selon eux, il vise à empêcher que la lumière soit faite sur les abus ayant suivi les attaques de 2003.
"Les responsables de cet acte veulent que les prisonniers d'opinion restent en prison", estime Mohamed Fizazi.Des sources concordantes avancent qu'une nouvelle liste de prisonniers susceptibles de bénéficier d'une grâce royale était en préparation avant l'attentat.
"On ne comprend pas à qui profite le crime", déclare de son côté Nadia Yassine, avant d'ajouter: "beaucoup de Marocains sont très sceptiques sur la thèse officielle" qui soupçonne Al-Qaïda.
Interrogé sur le fait que l'attentat n'ait pas été revendiqué, Khalid Naciri, porte-parole du gouvernement, a déclaré: "Je comprends parfaitement que l'opinion publique soit sur sa faim"."Si Al-Qaïda n'a pas revendiqué, cela ne veut pas dire qu'elle n'est pas responsable", a-t-il ajouté, répétant que "toutes les hypothèses sont encore présentes".
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