Au Sénégal, jour de fête pour les régates de Saint-Louis

Infos. Koutayé Niang participe à "la régate de Saint-Louis" depuis 20 ans, mais samedi, jour de compétition dans l'ancienne capitale sénégalaise, il a vécu "le plus beau jour de sa vie". 

Au Sénégal, jour de fête pour les régates de Saint-Louis
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Saint-Louis (Sénégal) (AFP)

Ce pêcheur du quartier de Guet N'dar - comme tous ses coéquipiers - est le capitaine de l'une des trois pirogues victorieuses de cette course traditionnelle, qui fait la fierté de la ville côtière et de ses habitants depuis des générations.

"Tous ceux qui vivent dans ma communauté, Dak, se sentent comme des rois aujourd'hui", savoure l'homme de 43 ans, enveloppé dans un drapeau aux couleurs rouge et verte de son équipe.Il a mis fin aux cinq ans de règne de l'équipe rivale.

La régate de Saint-Louis se déroule chaque année dans l'ancienne capitale coloniale française de l'Afrique de l'Ouest, à quelque 250 km au nord de Dakar.Des centaines d'hommes s'y affrontent dans une course de deux kilomètres et demi à bord de longues pirogues en bois, sur l'estuaire où le fleuve Sénégal vient se jeter dans l'océan Atlantique.

Cette compétition existe depuis plus d'un siècle mais ce n'est que dans les années 50 que l'événement a pris sa forme actuelle, explique à l'AFP le président du comité d'organisation, El Hadj Moctar Gueye.

"Il y a beaucoup plus de monde maintenant, et c'est plus officiel", explique N'Deye Seck, 75 ans, couturière au marché de N'dar et mémoire vivante du quartier.

Elle se rappelle avec nostalgie du jour où son père et ses frères y avaient participé en 1959, sous les yeux de l'ancien président français Charles de Gaulle venu au Sénégal à la veille de l'indépendance du pays.

- Effervescence -

Vendredi, un jour avant la grande course de l'année, le quartier de Guet N'dar bourdonnait d'une énergie nerveuse.

Des hommes en boubous traditionnels pour la prière du vendredi et des femmes enveloppées d'élégants foulards cherchaient à se frayer un passage dans les rues pleines d'enfants joyeux, de charrettes et d'animaux.

Plus loin sur la berge, un vieil homme écaillait des planches de bois pour en faire des rames.A ses côtés, des plus jeunes les peignaient en rouge et blanc.

Les pêcheurs de Saint-Louis sont répartis en trois équipes représentant chacune une partie géographique du vieux quartier.Des groupes de 50 à 70 personnes de chaque équipe s'affrontent ensuite dans l'une des trois catégories de course.

Younouss Dieye pense déjà à sa course du lendemain."Je suis stressé – je ne dormirai pas ce soir", confie-t-il à l'AFP.Il est rameur de l'équipe de Pondou Kholé et cela fait dix jours qu'il s'entraîne pour l'événement.

Au lever du jour, l'effervescence grimpe encore.C'est jour de fête.Des jeunes hommes jouent des percussions, les spectateurs dansent et soufflent dans des sifflets quand les minces bateaux de pêche, de 15 à 20 mètres, sont mis à l'eau.

Les boubous de la veille ont été remplacés par des maillots de sport colorés, notamment le maillot numéro 23 du basketteur américain des Los Angeles Lakers, Lebron James, omniprésent dans la communauté de Pondou Khole, dont les couleurs de l'équipe sont aussi le jaune et le bleu.

Plus bas sur la berge, dans la communauté Dak, des chefs spirituels brûlent de l'encens et brisent des paquets de glace là où les bateaux sont mis à l'eau.

- La fierté d'une ville -

Cette course de pirogues est une fierté à Saint-Louis."C'est le seul sport vraiment local ici", s'enthousiasme Assane Diaw, un ancien compétiteur qui affirme qui sa famille participe à la course depuis un siècle.

Au temps de son grand-père, les bateaux pour la course étaient les mêmes que ceux utilisés pour la pêche.A présent, ils sont spécialement conçus pour l'occasion.

L'après-midi, quand commence la compétition, des dizaines de milliers de spectateurs se rassemblent sur les bords du fleuve. 

Pour mieux voir le spectacle, des jeunes se massent sur le pont Faidherbe, monument historique qui relie l'île de Saint-Louis et son quartier des pêcheurs.

La tension monte.Les supporters s'excitent quand les champions en titre de Pondou Kholé commencent à invectiver les rameurs de l'équipe Dak.

Quand cette dernière finit par l'emporter, certains spectateurs sont transportés de joie.Ils se jettent à l'eau.Les vainqueurs hurlent leur bonheur en se frappant sur la poitrine avant de retourner leur embarcation.

Samedi soir, Koutayé Niang, le capitaine, était au paradis. 

"Guet N'dar est un village où tout le monde vit ensemble - nous partageons tout", explique-t-il.Le soleil se couche derrière ses épaules.L'appel à la prière du soir retentit."Nous sommes un et indivisible - les trois équipes sont vraiment une famille", se réjouit-il.

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