L'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), un espace de 88 pays membres, associés ou observateurs, doit affirmer "son influence dans un monde fracturé" par des crises multiples, a estimé sa secrétaire générale Louise Mishikiwabo, au début d'un sommet de deux jours sur l'île de Djerba.
"La Francophonie doit rester un trait d'union pour éviter que les tensions ne dégénèrent en conflits", a souligné l'ex-cheffe de la diplomatie rwandaise, prônant une "Francophonie décomplexée" et "plus soudée" dans "l'élaboration de positions communes" pour aller vers un "multilatéralisme repensé".
Elle a cité les nombreuses "tempêtes" traversées par la planète, notamment la pandémie de Covid-19 ainsi que les défis environnementaux et technologiques.
Le sommet doit officiellement mettre l'accent sur l'économie, avec comme slogan "le numérique comme vecteur de développement"."Il est de notre ressort de mener la bataille pour l'emploi des jeunes dans notre espace", a dit Mme Mishikiwabo, dont les projets sont aussi axés sur l'entreprenariat féminin.
Le sommet de l'OIF -- fondée en 1970 -- coïncide avec la phase finale de la COP27 sur le climat en Egypte et fait suite à une réunion du G20 en Indonésie dominée par la guerre en Ukraine, pays observateur au sein de l'OIF.
- "Résultats tangibles" -
La cheffe de l'OIF n'a pas mentionné ce conflit dans son discours, mais le président français Emmanuel Macron, présent au sommet, a dit vouloir en discuter avec les autres dirigeants, selon son entourage.
Sur ce dossier, un fossé s'est creusé entre les pays d'Afrique regrettant un manque de solidarité internationale avec le continent, face à des Occidentaux très mobilisés en revanche pour venir en aide à l'Ukraine.
Kais Saied, le président de la Tunisie, qui accueille ce sommet seize mois après son coup de force en juillet 2021, a émis le souhait de voir la réunion apporter des "résultats tangibles et effectifs" face "aux bouleversements que connaît le monde".
Faisant allusion aux fractures grandissantes entre pays pauvres et Etats développés siégeant au sein de l'OIF, le président Saied a appelé à "rêver d'un monde meilleur pour l'humanité toute entière, pour un développement universel fondé sur la justice et la liberté".
Lors d'une conférence de presse à Tunis, le Front de salut national, qui regroupe ses principaux opposants, a regretté que la Tunisie "accueille le sommet alors que ses institutions sont dépourvues de légitimité".
- "Ronron des sommets" -
Au nom de la France, Emmanuel Macron a prôné une "Francophonie d'action" loin du "ronron des sommets".Il a eu une entrevue avec le président Saied, à l'issue de laquelle la France a annoncé un prêt de 200 millions d'euros à la Tunisie, pour soutenir son économie chancelante.
Rappelant que la Tunisie, "comme de nombreux pays de la région, dépendait beaucoup des céréales ukrainiennes et russes", M. Macron a souligné que "des financements ont été apportés" pour l'aider à s'approvisionner en blé.
Outre M. Macron, d'autres dirigeants comme le Canadien Justin Trudeau, le président du Conseil européen Charles Michel ou le Sénégalais Macky Sall sont à Djerba.
En revanche, le président de République démocratique du Congo, Felix Tshisekedi, a préféré rester dans son pays en plein conflit dans l'Est avec les rebelles du M23.Et son Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde, a refusé de poser sur la photo de famille à côté du président rwandais Paul Kagame pour "manifester la totale désapprobation du gouvernement contre l'agression rwandaise", a-t-il dit sur Twitter.
De son côté, Nikol Pachinian, le Premier ministre de l'Arménie et président sortant de la Francophonie, a mis à profit son discours pour dénoncer les "pressions injustifiées et non provoquées" de la part de l'Azerbaïdjan, son voisin.
Il a appelé la communauté internationale à condamner "l'occupation de parties du territoire arménien" et exiger "le retour des forces azerbaïdjanaises sur leurs positions antérieures".
La réélection pour quatre ans de la secrétaire générale de l'OIF, seule en lice, est aussi au menu de la rencontre jusqu'à dimanche entre représentants de cet espace de 321 millions de francophones, appelés à devenir 750 millions en 2050, grâce à l'Afrique.
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