Les caciques du parti de Nelson Mandela, plombé par la corruption et les divisions intestines, se réunissent vendredi à Johannesburg pour discuter de l'avenir de leur président.Majoritaire au Parlement depuis 1994, l'ANC choisit le chef de l'Etat depuis la fin de l'apartheid et l'avènement de la démocratie.
Le porte-parole du président avait prévenu jeudi que M. Ramaphosa ferait une annonce "imminente", tout en prévenant que l'heure était trop grave pour prendre des décisions "à la hâte".
Cyril Ramaphosa a passé toute la journée jeudi à consulter les poids lourds de son parti, écoutant les conseils, pesant ses soutiens.
Dans la matinée, des "proches" avaient confié aux médias sud-africains qu'il ne se battrait pas pour rester à son poste.Mais dans la soirée, l'inquiétude quant à son départ semblait avoir suscité un soudain revirement, le monde des affaires et une bonne partie de l'ANC volant à son secours.
"Les décideurs à la tête de l'ANC ne veulent pas qu'il parte", résumait à l'AFP un cadre du parti sous couvert d'anonymat.
Vendredi matin, même le chef de l'Eglise anglicane plaidait en faveur de celui que les Sud-Africains appellent familièrement "Cyril".
"Personne ne devrait être au-dessus de la loi, mais porter un jugement définitif sur une personne en se basant sur ce qui est en fait une commission d'enquête préliminaire, qui n'a pas fait de détermination finale des faits, pourrait conduire à l'anarchie", plaide Mgr Thabo Makgoba, successeur de Desmond Tutu.
- Cyril ou le chaos -
"Cyril" ou le chaos.C'est bien ce qui préoccupe nombre de Sud-Africains, y compris dans l'opposition, et les grands acteurs de la première puissance industrielle du continent.Le rand, la monnaie sud-africaine, a perdu jeudi 3% de sa valeur.
Tout semblait pourtant aller au mieux pour le président en début de semaine, à quinze jours d'une conférence cruciale de l'ANC.Il partait en grand favori pour obtenir la confiance en vue d'un deuxième mandat en 2024, si toutefois le parti, confronté à un désamour grandissant, remporte le scrutin.
Mais mercredi, une commission parlementaire a publié un rapport accablant sur le scandale de Phala Phala, du nom d'une propriété du président à la tête d'une fortune personnelle, où il élève du bétail, sa deuxième passion après la politique.
M. Ramaphosa, 70 ans, "a pu commettre" des "violations et des fautes" dans le cadre d'un cambriolage en 2020 dans cette ferme, qui a révélé la présence de liasses d'un montant de 580.000 dollars cachés sous les coussins d'un canapé dans "une chambre d'amis peu utilisée", selon le rapport.
Il se retrouve ainsi sous la menace d'une procédure de destitution.Le Parlement se réunit mardi pour voter ou non l'enclenchement d'une procédure en ce sens.
L'ANC y jouit d'une confortable majorité mais fera-t-il bloc autour de son président?Jeudi, plusieurs de ses membres influents en ont donné le gage, multipliant les interventions dans les médias et sur les réseaux sociaux.
"Nous irons au Parlement mardi, nous rejetterons ce rapport et la vie reprendra comme avant", assure confiant le député Mathole Motshekga, partisan affiché du président.
"Le rapport ne dit pas qu'il doit répondre de cette affaire, il dit qu'il pourrait avoir à en répondre", nuance-t-il auprès de l'AFP, assurant que désormais "l'affaire est politique".
Le scandale a éclaté en juin quand un ex-responsable du renseignement, proche des opposants à Ramaphosa au sein de l'ANC, a déposé plainte.Des cambrioleurs, neutralisés en février 2020 à Phala Phala, ont révélé la présence de ces liasses camouflées, assure la plainte, accusant le président de ne pas avoir signalé l'incident ni à la police ni au fisc.
M. Ramaphosa a toujours démenti.Selon lui, un homme d'affaires soudanais a acheté des buffles dans son domaine et payé en liquide.Un employé a ensuite cru bon de cacher l'argent sous des coussins plutôt que dans un coffre-fort auquel plusieurs salariés avaient accès.
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