Selon la Commission électorale (Inec), Bola Tinubu, du Congrès des progressistes (APC), a cumulé plus de 8,8 millions de voix, soit 36%, remportant l'une des élections les plus disputées de l'histoire démocratique du Nigeria, face à ses deux principaux concurrents.
Atiku Abubakar, le candidat de la principale formation de l'opposition (le PDP, qui dirigea le pays de 1999 à 2015), a recueilli 29% des suffrages.L'outsider Peter Obi du Parti travailliste (LP), dont la popularité auprès de la jeunesse a donné un nouvel élan à la campagne, a remporté 25%.
Peu après les résultats, les partisans de M. Tinubu l'ont accueilli à son siège de campagne, criant "Jagaban" (le chef).
"C'est un moment exceptionnel dans la vie de tout homme, et une confirmation de notre existence démocratique”, a déclaré M. Tinubu.
"J'appelle mes concurrents à faire équipe ensemble.C'est la seule nation que nous ayons", a-t-il lancé à l'intention de l'opposition, qui l'a accusé de fraudes "massives" et a demandé l'annulation de cette élection.
"C'est un pays que nous devons construire ensemble", a-t-il lancé à ses rivaux.
A 70 ans, l'ancien gouverneur de Lagos (sud-ouest), surnommé "le parrain" à cause de son immense influence politique, accède à la plus haute marche du pouvoir, l'ambition de toute une vie."C'est mon tour", n'avait-il d'ailleurs de cesse de répéter durant la campagne.
A Lagos, mégapole de 20 millions d'habitants, hormis de petits rassemblements où des jeunes exultaient et agitaient des drapeaux du parti au pouvoir, la vie reprenait son cours mercredi.
"Le pays doit aller de l'avant", selon Abiola Adesina, un chauffeur de 47 ans qui se réjouissait de la victoire de M. Tinubu: "Oui, il est vieux, mais il est ouvert d'esprit et il va garantir l'unité de notre pays".
- "Dépités" -
Bola Tinubu succédera au président sortant Muhammadu Buhari, 80 ans, qui se retire après deux mandats comme le veut la Constitution.
Ce dernier a salué mercredi sur Twitter la victoire de M. Tinubu: "Élu par le peuple, il est la meilleure personne pour ce poste."
Le président sortant a certes reconnu des "failles" dans le processus électoral, dénoncées par de nombreux observateurs, mais pour lui, elles n'ébranlent en rien la "régularité" du scrutin."Il ne fait aucun doute que la décision du peuple a été rendue dans les résultats que nous observons aujourd'hui", a-t-il souligné.
Il a également demandé aux candidats de l'opposition "qui ressentent le besoin de le contester" de "s'adresser aux tribunaux et non à la rue".
Car cette victoire laisse un goût amer à une partie de la jeunesse, qui avait porté ses espoirs de changement en la personne de Peter Obi.
Cet ancien gouverneur de 61 ans, vu comme jeune et intègre, s'était imposé comme le candidat de la rupture face à l'élite vieillissante nigériane réputée corrompue.
"Nous sommes dépités", a lancé Nikodemos Daniel, un conducteur de moto de 27 ans à Onitsha (sud-est).
"Tinubu est l'un des pires.C'est un homme corrompu et méchant, je ne lui fais pas confiance", a-t-il lâché.
L'ascension politique de M. Tinubu a été rythmée par maintes accusations de corruption, sans qu'il ne soit jamais condamné et qu'il a toujours niées.
- "Simulacre" d'élection -
Le Nigeria - 216 millions d'habitants - devrait devenir en 2050 le troisième pays le plus peuplé au monde, dans une Afrique de l'Ouest menacée par un recul démocratique et la propagation de violences jihadistes.
La première économie du continent est devenue une puissance culturelle mondiale, grâce notamment à l'Afrobeats, genre musical qui enflamme la planète avec des stars comme Burna Boy.
Mais M. Tinubu héritera surtout d'une myriade de problèmes.Pendant quatre ans, il aura la lourde tâche de redresser le géant anglophone, plombé par une économie en berne, les violences récurrentes de groupes armés et de bandits, ainsi qu'un appauvrissement généralisé de la population.
Longtemps donné grand favori dans cette élection, ce Yorouba de confession musulmane avait pourtant vu son avance se réduire au fur et à mesure de la campagne.
En raison de la popularité grandissante de Peter Obi, puis de graves pénuries qui ont aggravé la colère déjà grande des Nigérians contre le pouvoir, au bilan désastreux, entre explosion de l'insécurité et du coût de la vie.
Plus de 87 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes samedi et le vote, dont la participation n'est pas encore connue, s'est globalement déroulé dans le calme.
Depuis le retour de la démocratie en 1999, le Nigeria a organisé sept élections nationales, qui ont quasiment toutes été contestées.
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