Il est responsable de l'atelier recyclage du Plastic Odyssey, un navire-laboratoire parti de France pour un tour du monde de trois ans afin d'offrir des solutions à la pollution plastique et de développer un réseau mondial d'initiatives locales.
Ce jour-là dans le port de Dakar, l'équipage du bateau, une vingtaine de personnes, s'active à tous les étages pour recevoir des porteurs de projets locaux et leur faire découvrir les techniques de recyclage proposées par Plastic Odyssey.
A l'arrière du navire, les machines bourdonnent déjà quand ils arrivent.Le bateau offre un circuit complet: un broyeur pour réduire les déchets en copeaux, un bac de lavage, une centrifugeuse pour les sécher, une extrudeuse pour les transformer.L'idée est de proposer une technologie simple d'utilisation, sans brevet et facilement accessible.
Les questions fusent."Il faut combien de temps de refroidissement ?", "Combien ça coûte?", "Est-ce qu'il y a des moyens d'augmenter la densité?".Chacun partage ses techniques, son savoir-faire, son expérience.
Tous développent déjà des projets en lien avec le plastique mais ils voient la formation à bord du bateau comme une rampe d'accélération et une plateforme d'échanges nécessaire dans un pays confronté à la pollution plastique.
- Pluie d'idées -
"Etre ici élargit mon champ d'action et de réflexion.J'ai vu que c'était faisable d'installer des machines peu coûteuses pour le recyclage.On savait qu'on avait la capacité de le faire mais on ne savait pas comment faire", confie à l'AFP Boubacar Diakhité, de l'entreprise Défaratt basée à Gandiol, dans le nord.
"Des idées ? ça en donne 100 à la minute, c'est incroyable de pouvoir rencontrer tous ces entrepreneurs", s'enthousiasme Lenora Hamon, 29 ans, qui projette de lancer en Casamance (sud) avec l'association Nio Far une unité de transformation du plastique.
Les rues au Sénégal sont communément jonchées de déchets plastiques.Les plages en sont souillées.Les décharges sauvages abondent.La décharge de Mbeubeuss, près de Dakar, l'une des plus grandes d'Afrique, reçoit chaque jour plus de 3.000 tonnes de détritus, polluant les sols et les eaux.
Pour Simon Bernard, cofondateur de Plastic Odyssey, il faut conjuguer deux approches: recycler les immenses quantités de plastique laissées en héritage et réduire drastiquement la production de déchets.Chaque minute dans le monde, ce sont près de 20 tonnes de plastique qui terminent dans l'océan et se transforment en microparticules irrécupérables.
Si les autorités sénégalaises ont interdit les sachets plastiques à usage unique en 2020, "la loi n'est toujours pas appliquée et les solutions alternatives ne sont pas proposées", déclare Aisha Conte, présidente de l'association Zéro déchet dans le pays.Elle déplore "un manque de volonté politique".
- Projet pilote -
De jeunes entrepreneurs comme Abdoul Bakhy Mbacke tentent de faire bouger les lignes.Avec CIPROVIS, il a lancé une gamme d'activités qui vont de la sensibilisation à la revalorisation.
L'idée de s'engager dans la gestion des déchets lui est venue dans son quartier."Le camion de ramassage ne passait que sur les grands axes, et des décharges sauvages se créaient un peu partout.On a pensé à utiliser des tricycles pour se faufiler dans les petites rues et offrir un service de proximité de collecte des déchets", explique-t-il.
Dans la zone industrielle de Diamniadio, à une trentaine de kilomètres de Dakar, il montre le centre de recyclage où sont déposés les déchets plastiques récoltés auprès des entreprises et des ménages qui souscrivent à un abonnement variant entre 6.000 et 9.000 francs CFA par mois (de 9 à 13 euros).Il dit récupérer chaque jour 15 tonnes de déchets, parmi lesquels 20% environ de plastique.
Des monticules d'emballages et de bouteilles s'entassent près d'imposantes machines dont la plupart sont à l'arrêt ou en cours de maintenance.Actuellement, il s'appuie sur des partenaires pour la phase de transformation mais souhaite monter un projet pilote avec Plastic Odyssey pour développer sa propre activité de recyclage.
Il estime que le secteur devrait être subventionné."Les coûts sont répercutés sur les clients alors qu'on devrait au contraire les inciter à trier", explique-t-il."Aujourd'hui, on se substitue un peu à l'Etat mais ça ne nous décourage pas.C'est notre Sénégal.Si l'Etat décide de nous rejoindre, on les recevra avec plaisir mais on n'attend personne".
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