"La résolution du Parlement européen n'engage aucunement la France", affirme Christophe Lecourtier dans une interview, à la Une ce week-end, de l'hebdomadaire francophone Tel Quel, après que le vote européen a déclenché un nouveau coup de froid entre Rabat et Paris. "Nous, on est comptables des décisions des autorités françaises, le Parlement européen est loin de notre autorité, ce sont des personnalités qui ont été élues. On y trouve une diversité de groupes et de courants d'idées", explique le diplomate qui a pris ses fonctions fin décembre. "Le gouvernement français ne peut pas être tenu pour responsable des eurodéputés", insiste M. Lecourtier. Le Parlement européen a adopté, le 19 janvier, à une large majorité une résolution enjoignant aux autorités marocaines de "respecter la liberté d'expression et la liberté des médias" et de mettre fin au "harcèlement de tous les journalistes". Plusieurs journalistes indépendants et opposants ont été condamnés pour des accusations à caractère sexuel, lesquelles, selon des ONG de défense des droits humains, ont été "fabriquées" par les autorités marocaines. Pour ces dernières, ces cas "n'ont rien à voir" avec la liberté d'expression. Le texte des eurodéputés --non contraignant-- fait également état de l'implication présumée de Rabat dans le scandale de corruption qui ébranle le Parlement européen depuis décembre. Depuis le vote, la classe politique marocaine et les médias proches du pouvoir ne décolèrent pas contre Paris. Un parlementaire, Lahcen Haddad, a regretté qu'"un proche de la présidence française", Stéphane Séjourné, chef du groupe centriste Renaissance (Renew) à Bruxelles, en ait été "l'un des architectes". - "Accusations inventées" - Paris a réfuté l'existence de toute crise avec Rabat, même si la perspective annoncée d'une visite d'Etat du président Emmanuel Macron dans le royaume chérifien paraît s'éloigner. "S'il (l'ambassadeur de France) a raison, techniquement parlant, la France devrait publiquement exprimer son inquiétude quant à la détérioration de la situation des droits de l'Homme au Maroc, et spécifiquement à propos de la poursuite des journalistes, qu'il s'agisse d'accusations sur la liberté d'expression ou d'accusations criminelles inventées"", a réagi auprès de l'AFP Eric Goldstein, directeur adjoint de l'ONG Human Rights Watch (HRW) pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Au-delà du vote des députés européens, il est reproché à la France de traîner des pieds sur la question du Sahara occidental contrairement aux Etats-Unis et à l'Espagne qui ont reconnu la "marocanité" de ce territoire, "cause nationale" au Maroc. En outre, le rapprochement entre Paris et Alger, rivale régionale du Maroc, suscite des aigreurs à Rabat. Ces nouveaux sujets de crispations surviennent alors que les deux pays semblaient avoir apaisé les tensions nées de la crise des visas qui empoisonnait les relations bilatérales depuis septembre 2021. Selon l'ambassade de France à Rabat, l'activité consulaire a repris à un rythme normal après la fin de la mesure de Paris de réduire de moitié les permis d'entrée accordés aux Marocains, arguant de la réticence du royaume à réadmettre ses ressortissants en situation irrégulière dans l'Hexagone. "Sur la question des visas, il a été jugé qu'il fallait revenir à la situation antérieure (...). J'ai été envoyé ici pour tourner la page", souligne M. Lecourtier dans son entretien avec Tel Quel. La France a octroyé en 2022 142.921 visas à des Marocains, soit plus du double du nombre accordé en 2021 (69.408 visas), selon le ministère de l'Intérieur français. En revanche, ce chiffre reste bien en deça de l'année 2019, avant la pandémie de Covid-19 (346.032).
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