Des dizaines de proches des disparus et de nombreux Gabonais venus les soutenir campent sur le quai de Port Môle, le port commercial de la capitale Libreville transformé en chapelle ardente, d'où l'Esther Miracle avait appareillé.
La douleur a fait place à l'énervement et la colère, les familles reprochant aux autorités de ne pas les informer et aux secours d'être intervenus trop tard, même si 124 des 161 passagers et membres de l'équipage officiellement recensés ont pu être sortis vivants des eaux.
Le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, a décrété trois jours de deuil national les 14, 15 et 16 mars, dans une allocution retransmise lundi soir à la télévision nationale.
- Etat du navire -
Dans le même temps, réseaux sociaux et médias s'enflamment pour s'interroger sur l'état du navire et les autorisations de naviguer délivrées à ce bateau mixte de transport de fret et de personnes de la compagnie privée Royal Cost Marine (RCM).
Son âge est inconnu, la RCM étant injoignable, mais il avait été inauguré en novembre après l'aménagement d'une cabine pour passagers, selon le site internet de l'armateur aux prix inférieurs aux autres compagnies entre Libreville et le port pétrolier de Port Gentil, à 150 km plus au sud.
Une enquête administrative et une enquête pénale ont été ouvertes pour déterminer les causes du naufrage.Les autorités et le parquet refusent d'évoquer le sujet à ce stade.
Le navire a coulé en pleine nuit alors que mer et météo étaient relativement calmes, selon plusieurs pêcheurs et armateurs interrogés par l'AFP.
L'épave a été localisée dimanche "à une profondeur de 30 m et dans une position assise", a indiqué lundi à la télévision publique Gabon Première le capitaine de vaisseau Békélé Meyong, coordinateur des recherches. Il a situé l'épave à 10 km de la côte près de l'entrée du golfe qui abrite Libreville.
La veille, le Premier ministre Alain-Claude Bilie-By-Nze avait promis aux familles que les recherches ne cesseraient pas tant que le bateau n'avait pas été localisé puisque l'on n'était pas "sûrs d'avoir remonté tous les corps".
- Chapelle ardente -
Depuis samedi, Port Môle a pris des allures de grande chapelle ardente quand les autorités, pressées par les témoignages indignés sur les réseaux sociaux de familles qui y campaient jour et nuit et s'y disaient "abandonnées", ont commencé à dresser des tentes et muscler une cellule psychologique famélique aux premiers jours du drame.
Dans son pagne jaune flamboyant, Collette s'agenouille et allume une bougie blanche qu'elle dépose sur le lit de cire recouvrant le bitume sous les regards figés sur des photos des victimes du naufrage.
"Je viens en solidarité, pour prier et aider.Nous sommes plusieurs associations à distribuer de la nourriture et de l'eau", explique cette inspectrice pédagogique.
"Liste des parents disparus", lit-on sur un panneau de bois affichant 31 noms.
Des chaises en plastique blanc sont disposées sous trois barnums.Lundi, face à l'affluence, un quatrième a été installé ainsi que des toilettes et un groupe électrogène.
Une centaine de personnes se succèdent pour allumer des cierges, déposer fleurs et offrandes.Sous les tentes, certains prient en silence, d'autres chantent leur désespoir en prières.
- Alerte -
Son mégaphone à la main, Jeef Bantsantsa, sillonne le port.Ce trentenaire, porte-parole du collectif de soutien aux familles, fait un point d'information deux fois par jour sur les recherches.Sa "petite soeur" n'as pas encore été retrouvée.
"Nous voulons des réponses.Personne n'est venu vers nous.D'ici, on peut facilement voir ce qui se passe", explique-t-il.
"C'est minable.Pour un sauvetage de cette envergure on n'a même pas vu le minimum", s'indigne Eve Mouanambatsi, 49 ans, d'une famille de quatre disparus.
"L'alerte de détresse a été lancée à 2h du matin depuis le bateau et on retient que l'autorité publique n'a rien fait du tout.Il a fallu un bateau privé !", s'énerve-t-elle en évoquant la barge d'une compagnie privée arrivée, selon des rescapés et leurs familles, plusieurs heures après le naufrage.
"On sait qu'il n'y a pas d'espoir pour les retrouver vivants mais on a besoin de récupérer leurs corps", souffle Fernande Akare, 32 ans."J'attends de l'enquête de connaître les réelles causes de l'accident car il y a trop de spéculations, on veut la vérité !", assène-t-elle.
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