Les années de maquis
Le TPLF est un des nombreux enfants de l'effervescence estudiantine radicale baignant dans le marxisme-léninisme, qui agite l'Ethiopie impériale des années 1960 et 1970 dominée par l'élite amhara, deuxième peuple le plus nombreux du pays, derrière les Oromo.
Dans un pays mosaïque d'environ 80 peuples, la "théorie des nationalités" de Staline va inspirer - entre autres - quelques étudiants de la minorité tigréenne (6% de la population) pour fonder le TPLF.
L'empereur Haile Selassié a été renversé en 1974, mais le nouveau régime militaro-marxiste du Derg réprime durement les nombreuses revendications identitaires.
Organisé et discipliné, le TPLF s'étoffe et devient le fer de lance de la lutte armée contre le Derg.A la fin des années 1980, l'aide des puissants rebelles érythréens lui permet de mettre en déroute l'armée éthiopienne.
Quand les divers groupes armés anti-Derg s'unissent au sein d'un Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF), c'est le chef du TPLF Meles Zenawi qui en prend la tête.
L'ère Meles
Le 28 mai 1991, sous les uniformes de l'EPRDF, ce sont surtout les combattants du TPLF qui prennent Addis Abeba.
A 36 ans, Meles Zenawi devient l'homme fort de l'Ethiopie et le restera jusqu'à sa mort en 2012.
L'EPRDF gouverne officiellement, mais seul le TPLF décide réellement.
Meles s'appuie sur le système de "fédéralisme ethnique" qu'il a créé, basé sur des régions fédérées dessinées le long de lignes ethno-linguistiques: il divise pour mieux régner et s'affide des élites locales.
Après la guerre avec l'Erythrée entre 1998 et 2000, Meles purge le TPLF, fait taire toute voix dissidente et gouverne seul.
L'après Meles
Le décès brutal de Meles en 2012 laisse un TPLF affaibli, miné par la corruption.
L'EPRDF nomme Premier ministre le dauphin adoubé par Meles, Halemariam Desalegn.Mais celui-ci n'a pas la légitimité de la lutte armée, n'est pas tigréen et ne contrôle pas l'appareil sécuritaire et militaire, aux mains du TPLF.
Malgré le développement économique rapide de l'Ethiopie, presque 30 ans de domination tigréenne, d'absence de liberté et de corruption galopante, ont alimenté la frustration.Notamment des Oromo et des Amhara qui prennent la tête de manifestations antigouvernementales poussant M. Hailemariam à démissionner en février 2018.
La disgrâce
Pour le remplacer, l'EPRDF choisit Ahmed Abiy - un Oromo - consacrant la perte d'influence d'un TPLF divisé sur cet ancien maître-espion.
Arrivé au pouvoir, celui-ci s'emploie à marginaliser le TPLF, encore puissant dans l'appareil politico-militaire, et à écarter ses hommes des postes-clés.
Quand M. Abiy décide de fondre la coalition au pouvoir en un seul parti, le TPLF passe à l'opposition et se replie au Tigré, où il se reconstruit une légitimité populaire et défie l'autorité d'Addis Abeba.
Le conflit
Après des mois de tensions, Abiy Ahmed envoie l'armée éthiopienne au Tigré pour en déloger les dirigeants du TPLF, accusant les forces régionales tigréennes - nombreuses et bien équipées - d'avoir attaqué des bases militaires fédérales.
La capitale régionale, Mekele, est prise en trois semaines, mais dirigeants et combattants du TPLF se réfugient dans les montagnes, entamant une guerre de harcèlement contre les troupes fédérales.
Désormais classé "organisation terroriste" par les autorités fédérales, le TPLF lance fin juin 2021 une contre-offensive et reprend l'essentiel du Tigré, où il se replie finalement après avoir avancé jusqu'à quelques centaines de km d'Addis Abeba.
Après une trêve "humanitaire" en mars 2022, puis une reprise des combats à grande échelle fin août 2022, le TPLF signe en novembre, à Pretoria, un accord de paix avec le gouvernement fédéral, mettant fin à deux ans de conflit brutal et très meurtrier.
Il accepte de désarmer, en échange de la réouverture des accès - notamment humanitaire - à la région, largement coupée du monde durant près de deux ans.
Le 22 mars 2023, le TPLF est retiré de la liste des entités terroristes, conformément à l'accord de paix, ouvrant la voie à la mise en place d'une administration intérimaire au Tigré, qu'il devrait diriger.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous