A la mi-journée, des frappes aériennes ont à nouveau fait trembler le centre de la capitale, non loin du QG de l'état-major de l'armée, ont rapporté des témoins.Le bruit des armes est incessant, comme c'est le cas quotidiennement depuis le début des combats le 15 avril, qui ont fait 413 morts et 3.551 blessés, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
De nouveaux hôpitaux ont été fortement endommagés à Khartoum, et quatre établissements ont été touchés à al-Obeid, à 350 km au sud de la capitale, souligne le syndicat des médecins: au total "70% des hôpitaux en zone de combat sont hors service".
Pour porter assistance aux civils, le Comité international de la Croix-Rouge réclame un "accès humanitaire immédiat et sans entraves (...) une obligation au regard du droit international humanitaire".
Depuis six jours des combats opposent à Khartoum et au Darfour (ouest) principalement, l'armée sous le commandement du général Abdel Fattah al-Burhane, chef de facto du Soudan depuis le putsch de 2021, aux FRS que dirige le général Mohamed Hamdane Daglo.
Longtemps latent et cantonné aux négociations sur les conditions d'intégration des FSR aux troupes régulières, pour finaliser un accord politique sur le retour des civils au pouvoir, le conflit entre les deux camps s'est transformé en lutte armée.
Au Darfour, l'une des régions les plus pauvres du Soudan, "la situation est catastrophique", raconte un docteur de Médecins sans frontières (MSF).
- "Patients à même le sol" -
"Il y a tellement de patients qu'ils sont soignés à même le sol dans les couloirs parce qu'il n'y a tout simplement pas assez de lits", dit-il depuis cette région où les miliciens Janjawids, le gros des FSR, ont commis d'atroces exactions lors de la guerre déclenchée en 2003 par le dictateur Omar el-Béchir, déchu en 2019.
L'armée de l'air, qui vise les FSR disséminées dans les zones résidentielles, n'hésite pas à larguer des bombes.Dans ce chaos, "70% des 74 hôpitaux de Khartoum et des zones touchées par les combats ont été mis hors d'usage", rapporte le syndicat des médecins.
Les consultations diplomatiques, elles, s'intensifient: le ministre britannique des Affaires étrangères, James Cleverly, a écourté une tournée en Asie-Pacifique "à cause de la situation au Soudan".
Jeudi, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, et le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, avaient appelé à un cessez-le-feu durant "au moins" les trois jours de l'Aïd.
Mais regrette Sami al-Nour, un habitant de Khartoum, "on passe l'Aïd avec en fond sonore le bruit des tirs et l'odeur de la mort à la place des gâteaux, des enfants heureux et du bon temps en famille". Pour Ibrahim Awad, un autre habitant de la capitale, "la situation était inévitable: un pays avec deux dirigeants et deux armées ne peut pas aller de l'avant".
Le général Daglo était depuis le putsch d'octobre 2021 le numéro deux du général Burhane.Ce dernier est apparu jeudi pour la première fois depuis le début des hostilités à la télévision d'Etat.
"Pour l'Aïd, notre pays saigne: la destruction, la désolation et le bruit des balles ont pris le pas sur la joie", a-t-il déclaré.Jusqu'ici, comme son rival, le général Daglo, il n'avait parlé qu'à des médias et ne s'était pas adressé directement aux 45 millions de Soudanais.
- Cadavres sur les routes -
De leur côté, les Etats-Unis, ont annoncé l'envoi de militaires dans la région pour faciliter une éventuelle évacuation de leurs ambassades et ressortissants ; la Corée du Sud et le Japon vont eux envoyer des avions alors que l'aéroport est fermé depuis samedi.L'Union européenne envisage pour sa part une évacuation dès que possible par voie terrestre.
Femmes et enfants essentiellement se pressent sur les routes pour fuir, entre points de contrôles et cadavres.
Depuis le début des hostilités, 10.000 à 20.000 personnes, surtout des femmes et des enfants, sont passés au Tchad voisin, selon l'ONU.
Les deux camps multiplient les annonces de victoire et s'accusent d'avoir rompu les trêves promises, des affirmations impossibles à vérifier sur le terrain.
Les humanitaires ont pour la plupart été forcés de suspendre leur aide après que trois employés du Programme alimentaire mondial (PAM) ont été tués.
Vendredi, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé la mort d'un humanitaire de cette agence de l'ONU victime d'un échange de tirs au sud d'al Obeid.
"Ni Burhane ni Daglo n'ont l'air de vouloir céder, la situation pourrait encore empirer", estime le centre de recherche International Crisis Group (ICG).
"Un conflit de longue durée serait la ruine du Soudan", troisième producteur d'or d'Afrique où pourtant plus du tiers de la population souffre de la faim, ajoute l'ICG.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.