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L'Aide médicale d'État : quelles sont les conditions pour en bénéficier ?

La réforme ou la suppression de l’aide médicale d'État est revenue au cœur de l’actualité après les récentes déclarations, les 22 et 23 septembre, du Premier ministre Michel Barnier et du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, qui perçoit l’A.M.E comme un facteur d’attractivité pour les candidats à l’immigration. En France près de 466 000 personnes bénéficient de ce dispositif.

Pour bénéficier de l'AME chaque demandeur doit remplir ce formulaire
Pour bénéficier de l'AME chaque demandeur doit remplir ce formulaire
Crédit : Keisha MOUGANI/ Africa Radio

13h59 par Keisha MOUGANI

Écoutez Guillaume Bellon

"Qu'est-ce que c'est l'A.M.E ? Concrètement, c'est une carte qui va permettre, quand on la présente, de ne pas payer le médecin.", explique Guillaume Bellon, coordinateur d'un Caso (centre d'accueil, de soins et d'orientation) de Médecins du monde à Saint-Denis.

Ce centre de santé, qui accueille près de 4 000 personnes chaque année, a pour mission de prodiguer les premiers soins, d'orienter et d'accompagner les personnes en situation irrégulière dans certaines démarches administratives, notamment pour la demande de l'Aide médicale d'État. "C'est l'un des mandats prioritaires de l'association", souligne Guillaume Bellon.

En France, 466 000 personnes bénéficient de ce dispositif, mis en place en 2000 par le gouvernement de Lionel Jospin pour permettre l'accès aux soins aux ressortissants étrangers en situation irrégulière et précaire. "Elle ouvre la gratuité à un panier de soins, précise-t-il, ce n'est pas l'équivalent d'une carte vitale : elle ne permet pas le tiers payant pour les professionnels et les bénéficiaires de l'A.M.E ne sont pas des assurés sociaux. Ils ne reçoivent pas les campagnes de santé publique pour faire des dépistages."

Mais pour en bénéficier, il faut remplir plusieurs critères : il faut prouver que sa présence sur le territoire français, en situation irrégulière est supérieure à trois mois, avoir une adresse administrative, et prouver son identité. Mais certains demandeurs se heurtent à plusieurs barrières comme celle de la langue, le formulaire n'étant qu'en français, et la difficulté à pouvoir fournir certaines preuves, notamment lorsqu'il faut déclarer ses ressources.

"On parle de personnes qui sont en situation administrative irrégulière et pour beaucoup, une des possibilités de survie, ça va être de travailler sous alias, c'est-à-dire avec les papiers d'une autre personne et de travailler sans être déclaré sur les marchés. Et si elles ne déclarent aucune ressource, elles peuvent se voir refuser leur aide médicale d'État.", analyse le coordinateur. 

La restriction ou suppression de l'A.M.E : la crainte d'une dégradation de la santé des personnes exilées 

Perçu comme un dispositif attirant les candidats à l'immigration vers la France par une partie de la droite et de l'extrême droite, les récentes déclarations du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, lundi 23 septembre et du Premier ministre Michel Barnier, dimanche 22 septembre, concernant une refonte de ce dispositif, ont suscité de nombreuses réactions, notamment dans le monde de la santé, qui se déclare défavorable à une suppression ou une transformation de l'A.M.E. en Aide médicale d'urgence. 

 Pour Guillaume Bellon, il y aurait trois conséquences à une suppression à restriction de l'A.M.E : la dégradation de l'état de santé des personnes exilées, leur exposition à certaines épidémies "Nous venons de sortir, il n'y a pas si longtemps, d'une épidémie de COVID, et il y a aujourd'hui une augmentation des cas de coqueluche, par exemple, ainsi que de Mpox, souligne-t-il.  Il y a des questions de santé publique qui nécessitent que toute la population présente sur le territoire puisse avoir accès à la prévention et aux soins d'un certain nombre de pathologies", ainsi qu'un retard dans la prise en charge de certaines pathologies. 

Un risque, qui selon le coordinateur peut mener à une saturation des hôpitaux. "Je crois qu'on n'a pas besoin de discuter de l'état de l'hôpital aujourd'hui, qui se retrouverait à absorber des gens qui auraient pu être vus en médecine de ville et qui vont en plus se présenter avec des pathologies plus lourdes", détaille-t-il. 

D'après un rapport du Sénat, publié début 2023,  le coût global de l'AME est estimé de 1,140 milliard d’euros à la charge de l’Assurance-maladie, ce qui représente que 0,5% du total des dépenses de santé en France.