Les témoignages et analyses recueillis au cours de la mission ont révélé un environnement marqué par la précarité et les actes d'intimidation visant les défenseurs du droit à la santé et des droits humains des personnes LGBTI, dans le contexte de la pénalisation de l'homosexualité. Les chargés de mission ont notamment pu rencontrer des membres d'organisations de défense des droits de l'Homme, des personnes LGBTI, des journalistes, avocats, des acteurs de la santé sexuelle, des représentants des �?glises, des autorités et institutions nationales et des missions diplomatiques.
�? ce jour, le Cameroun se distingue comme le pays comptant le plus de personnes poursuivies, condamnées et emprisonnées pour « relations sexuelles consenties entre personnes du même sexe » (article 347 bis du Code pénal). En dépit du moratoire promis par le Président Biya sur les arrestations effectuées fondées sur l'article 347bis du Code Pénal, au moins 15 personnes (hommes et femmes) seraient à ce jour détenues dans les prisons camerounaises en raison de leur orientation sexuelle réelle ou imputée.
Entre 2012 et 2013, plusieurs défenseurs ont subi des persécutions ciblées, manifestement motivées par leur soutien aux personnes LGBTI. Or, selon les membres de la mission, « Les autorités camerounaises ne donnent aucun signe concret de leur volonté de faire cesser ces persécutions. D'après les informations recueillies, aucun auteur de chantages et extorsions n'a jamais été arrêté ni inquiété, les plaintes déposées par les défenseurs sont toutes restées sans suite. Ce qui est d'autant plus préoccupant que des agents de la force publique seraient impliqués dans plusieurs de ces affaires ».
Concernant plus particulièrement l'enquête sur la mort d'�?ric Ohena Lembembe, directeur exécutif de la Fondation camerounaise de lutte contre le sida (CAMFAIDS) et journaliste engagé dans la défense des droits des personnes LGBTI, la mission a trouvé que le seul acte de procédure engagé par le juge d'instruction à ce jour est une « citation à témoin... pour être inculpé et interrogé sur les faits de vol aggravé mis à sa charge » signifiée par huissier le 17 octobre 2013 à six personnes proches de la victime. « L'inertie des autorités camerounaises encourage le sentiment d'impunité des auteurs des crimes et persécutions subis par les personnes LGBTI, et alimente la stigmatisation et la discrimination à l'encontre de ces personnes et des défenseurs de leurs droits », ont déclaré les membres de la mission.
A ce contexte répressif s'ajoute le fait que les institutions chargées de garantir le respect des droits des citoyens manquent d'indépendance ou de moyens. En particulier, la Commission nationale des droits de l'Homme et des libertés (CNDHL) ne dispose ni des pouvoirs ni de l'indépendance nécessaires pour protéger les citoyens camerounais et, en particulier, les citoyens les plus vulnérables, dont les personnes LGBTI. Par ailleurs, le système de l'assistance juridictionnelle est inopérant, ce dont il résulte que les citoyens les plus vulnérables n'ont, de fait, accès ni à la justice ni à un procès équitable. Cette situation est d'autant plus grave pour les personnes suspectées d'homosexualité que seulement trois à quatre avocats acceptent de les représenter devant les autorités policières et judiciaires, augmentant ainsi la stigmatisation dont sont victimes ces avocats.
« Dans ce contexte, les défenseurs des personnes LGBTI travaillent dans un climat d'inquiétude et de précarité lié au manque de soutien institutionnel durable en faveur des organisations identitaires. Cette précarité conduit les organisations à se « cacher » derrière les activités de lutte contre le VIH en faveur des populations les plus exposées ciblées par le Plan Stratégique National de lutte contre le VIH/SIDA », déplorent les membres de la mission.
L'Observatoire publiera dans les mois à venir un rapport de mission complet sur la situation des défenseurs des droits des personnes LGBTI au Cameroun qui adressera également des recommandations spécifiques aux autorités nationales, aux acteurs non-étatiques, aux organisations internationales, aux chancelleries et aux mécanismes de protection des droits de l'Homme nationaux, régionaux et internationaux.
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