Afrique du Sud: le ministre des Finances lavé de tout soupçon de fraude

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Pretoria (AFP)

La justice sud-africaine a annoncé lundi l'abandon des poursuites très controversées pour fraude lancées contre le ministre des Finances Pravin Gordhan, qui ont révélé au grand jour les tensions agitant le gouvernement du président Jacob Zuma.

Après trois semaines de polémiques, le procureur général Shaun Abrahams a opéré un spectaculaire revirement en abandonnant toutes les accusations lancées contre M. Gordhan.

"J'ai ordonné le retrait des poursuites avec effet immédiat", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse.

Le patron du parquet avait annoncé le 11 octobre l'ouverture d'une enquête contre le ministre, soupçonné d'avoir favorisé les conditions du départ à la retraite d'un haut fonctionnaire en 2010 lors de son premier passage aux Finances (2009-2014).

Au terme de plus d'une heure d'un laborieux exposé truffé de références à la loi et à la jurisprudence, M. Abrahams - toute honte bue - a reconnu que les accusations initialement retenues contre M. Gordhan et deux anciens responsables des services du fisc sud-africain (Sars) étaient infondées.

"Je suis convaincu que (M.Gordhan et ses deux coaccusés) n'ont pas eu l'intention d'agir contre la loi", a-t-il justifié en énumérant les résultats de ses investigations.

Le ministre des Finances devait comparaître pour la première fois ce mercredi devant un tribunal de Pretoria.

L'annonce de l'enquête ouverte contre M. Gordhan a provoqué un séisme politique qui s'est propagé jusqu'au sommet de l'Etat et inquiète les investisseurs et les marchés financiers, dans un pays en pleine crise économique.

Rejoint par l'opposition et de nombreux analystes, M. Gordhan a jugé ses accusations sans fondements et les a attribuées au camp de M. Zuma, auquel il s'oppose sur la gestion des entreprises publiques et la lutte anticorruption.

Pressé de questions par les journalistes, M. Abrahams s'est efforcé lundi de nier toute interférence politique dans le dossier.

"Cette affaire a été traitée comme toutes les autres (...) réexaminer des décisions fait partie du quotidien du NPA (parquet général)", a-t-il souligné.

- Pressions -

Le haut magistrat a par ailleurs exclu toute excuse à M. Gordhan et à ses deux coaccusés pour les poursuites engagées et a écarté toute idée de démissionner. 

"Certainement pas !", s'est-il exclamé, soulignant la "transparence" de sa procédure.

M. Zuma avait lui-même nié toute pression sur la justice et même apporté son soutien à son ministre."Cette affaire n'a jamais été discutée avec le procureur général", avait-il assuré la semaine dernière devant le Parlement.

Cette affaire a fait éclater au grand jour de vives dissensions au sein du parti au pouvoir, le Congrès national africain (ANC).

Plusieurs de ses poids lourds ont publiquement apporté leur soutien au ministre, dont le vice-président Cyril Ramaphosa, et le chef des députés de l'ANC, Jackson Mthembu, a même réclamé la démission du président Zuma.

Mardi dernier, le chef de l'Etat avait nié toute influence sur les poursuites lancées par la justice contre M. Gordhan.

Plusieurs partis d'opposition, mais aussi des compagnons de route de l'ancien président Nelson Mandela, avaient appelé à manifester mercredi pour soutenir M. Gordhan.

Ministre des Finances de 2009 à 2014, Pravin Gordhan, 67 ans, a été rappelé en urgence fin 2015 à son poste pour apaiser les marchés, inquiets de la décision du président de renvoyer deux titulaires du portefeuille en quatre jours.

Outre les charges abandonnées lundi, M. Gordhan est également soupçonné d'avoir mis en place au sein du fisc sud-africain, qu'il a dirigé pendant dix ans jusqu'en 2009, une unité qui aurait espionné des hommes politiques, dont M. Zuma.

L'enquête est toujours en cours.

Elu en 2009, M. Zuma doit céder sa place à la tête de l'Etat à l'occasion des élections générales de 2019 mais son autorité est de plus en plus ouvertement contestée au sein de son parti.

Englué dans de nombreux scandales, le chef de l'Etat est notamment mis en cause pour ses liens sulfureux avec la famille d'hommes d'affaires Gupta.

Il a récemment obtenu l'interdiction de la publication d'un rapport potentiellement explosif de la médiatrice générale sur ses relations avec les Gupta.Cette décision, contestée, doit être évoquée mardi devant la justice mardi.

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