Devant le monde entier, Jacob Zuma a été hué par la foule pendant la cérémonie d'hommage à Nelson Mandela en décembre.Mais le président sud-africain semble indéboulonnable, survivant aux scandales année après année, grâce à sa mainmise sur l'ANC.
En passe d'être reconduit à la tête de l'Afrique du Sud après les élections législatives et provinciales du 7 mai, "JZ" ou "Msholozi" (son nom de clan), 72 ans, est arrivé au pouvoir en 2009, éclaboussé par des poursuites pour corruption - abandonnées - et un procès pour viol, dans lequel il a été acquitté.
Dimanche, dans le même stade où il avait été conspué en décembre, il a été acclamé par 100.000 partisans du parti au pouvoir, l'ANC, convoyés par bus pour un dernier meeting géant de campagne.Orateur médiocre pour lire ses discours, il fait en revanche remarquablement bien chanter et danser les foules, un charisme personnel qui plaît à l'Afrique du Sud profonde et fait la synthèse entre des opinions complètement opposées.
"Il n'a pas été brisé par les calomnies contre sa personne ou son leadership.Il est resté ferme, a maintenu tout le monde dans l'alliance (ANC, communistes et syndicats), se montrant très très accommodant avec les différents points de vue", souligne le président de la puissante confédération syndicale Cosatu, Sdumo Dlamini.
Sa force est aussi de "connaître la souffrance de monsieur Tout le monde", car "quand il parle de la pauvreté, il connaît", ajoute M. Dlamini, rappelant que M. Zuma est né sous l'apartheid d'une mère domestique et n'a pu aller à l'école qu'une fois en prison.
Selon ses détracteurs et nombre d'observateurs, le président tient le pays par le clientélisme, l'immobilisme, un subtil racisme anti-Blancs, la peur, les gages donnés aux chefs coutumiers, le verrouillage du parti, la poussée de l'ANC dans sa province natale, le Kwazulu-Natal, désormais branche numéro un du parti, et des nominations le protégeant des poursuites.
- "Ronald Reagan sud-africain" -
"Le grand problème avec Jacob Zuma", commente Gareth Newham, chercheur à l'Institut des études de sécurité (ISS), "ce sont les nominations répétées" dans l'appareil judiciaire ou sécuritaire, "avant tout très proches du président, de ses amis ou de sa famille", "des gens à l'éthique faible, sans qualification ni compétences".
"Il y a beaucoup de preuves que l'appareil judiciaire est complètement compromis pour protéger la faction pro-Zuma au sein du pouvoir et de la présidence de l'ANC et le protéger, lui et ses amis, de enquêtes et des poursuites pénales", ajoute M. Newham.
Dans son livre "Les années Zuma", le journaliste Richard Calland explique qu'il a cru un temps que Zuma serait le "Ronald Reagan sud-africain", avant de constater que "idéologiquement et politiquement, il est une case vide, un sorte de potentat médiéval cerné de douves sèches où groupes d'intérêt, organisations et factions diverses se battent pour la domination".
Maintes fois enterré par les commentateurs politiques, M. Zuma a toujours ressuscité.
D'aucuns l'ont cru mort - politiquement - après le massacre de 34 mineurs en grève à Marikana (nord) en août 2012 par la police.
D'autres ont prédit sa chute après le scandale de la rénovation de sa propriété familiale aux frais de l'Etat à Nkandla (est), pour 246 millions de rands (16,5 millions d'euros).
Les médias l'ont aussi mis en cause pour la débâcle militaire inédite de 2013 en Centrafrique, qui a coûté la vie à 15 soldats sud-africains.Ou lorsque ses amis d'une riche famille indienne ont obtenu le passe-droit du siècle, faisant atterrir leurs invités sur une base militaire, en complète infraction avec la loi.
"Même si les cinq dernières années ont été à ce point dominées par le scandale, il est difficile de le mettre en cause directement.L'ANC dit sans arrêt que ce n'est pas de sa faute à lui", commente Ranjeni Munusamy, journaliste au quotidien en ligne Daily Maverick et ancienne proche du président.
"Le fait est qu'en Afrique du Sud", dit-elle, "ce n'est pas nécessairement le meilleur leader qui devient président mais celui qui est le plus fort au sein de l'ANC, à cause de la domination du parti sur le pays".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.