Le président algérien Abdelaziz Bouteflika, qui brigue un quatrième mandat malgré ses ennuis de santé, a exhorté mardi ses compatriotes à se rendre aux urnes jeudi, en réaction à des appels au boycott et des mises en garde contre les fraudes.
"J'appelle toutes les citoyennes et tous les citoyens à participer à l'élection présidentielle et exprimer leur choix en consécration de la souveraineté de leur peuple", a lancé M. Bouteflika dans un message, alors que le taux de participation est un grand enjeu de la présidentielle.
Donné comme le favori du scrutin, M. Bouteflika, 77 ans, a jugé que "l'abstention, qu'elle procède d'une indifférence ou d'une attitude immotivée, dénote une propension délibérée à vouloir demeurer en marge de la nation".
Une coalition de cinq partis d'opposition appelle au boycottage, plaidant en faveur d'une "transition démocratique", tandis que le mouvement Barakat ("�?a suffit"), hostile à un quatrième mandat de M. Bouteflika, juge que cette élection est "un non-événement", sans toutefois appeler directement à son boycottage.
Outre le taux de participation, c'est la fraude, "mal incurable" selon le quotidien El Watan, qui fait débat, de récentes révélations d'un ancien wali (préfet) ayant confirmé que cette pratique avait bien lieu.
"Les élections seront truquées et le président sera élu pour un 4e mandat", a pronostiqué Abderrezak Mokri, le chef du Mouvement de la société pour la paix (MSP, islamiste) qui a appelé au boycott.
Ali Benflis, le principal rival de M. Bouteflika dont il fut l'homme de confiance au début de son premier mandat (1999/2004), et connaisseur des affaires du sérail, a fait de cette question un thème majeur de campagne.
- 'L'ennemi: la fraude' -
Il a décidé de faire de la fraude un "ennemi" car elle est "immorale et dégrade et déshonore tous ceux qui y ont recours".
Il a par ailleurs indiqué avoir mis en place une "armée" d'observateurs pour surveiller le déroulement du scrutin.
Et il a répété mardi lors d'une conférence de presse qu'il ne se tairait pas en cas de fraude en faveur du président sortant.
"Ne pas se taire, c'est protester, ne pas accepter le viol de la volonté populaire", a-t-il expliqué, sans pour autant explicitement à appeler à des manifestations si des soupçons de fraude venaient à être confirmés.
En s'adressant directement aux walis, leur demandant de ne pas se livrer à cette pratique et de penser à préserver leurs familles, il s'est attiré une violente charge de M. Bouteflika qui l'a accusé de "terrorisme".Une accusation jugée "irresponsable" par M. Benflis.
Mais le camp Bouteflika s'est servi des déclarations de M. Benflis pour raviver le sentiment de peur des Algériens qui gardent encore en mémoire les manifestations islamistes de 1991 ayant conduit à l'instauration de l'état de siège, puis à la guerre civile.
"Appeler à descendre dans la rue c'est ouvrir les portes de l'enfer", a ainsi mis en garde le directeur de cabinet de M. Bouteflika, Ahmed Ouyahia.
Le chef d'état-major de l'armée, le général Ahmed Gaïd Salah, est également monté au créneau, lors d'une visite mardi au commandement de la gendarmerie nationale, à Alger.
"Le peuple algérien saura, grâce à la conscience de ses jeunes et à leur éminent patriotisme, dresser un mur solide face à celui qui sera tenté d'exploiter cet important évènement national à des fins contraires aux intérêts supérieurs du pays", a-t-il mis en garde.
Outre MM.Bouteflika et Benflis, quatre autres candidats seront en lice jeudi pour la présidentielle, dont la députée trotskyste Louisa Hanoune.
Affaibli il y a un an par un AVC qui a conduit à son hospitalisation à Paris pendant près de trois mois, M. Bouteflika suit une rééducation pour récupérer toutes ses facultés d'élocution et sa mobilité.
Malgré les déclarations rassurantes de son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal, qui a affirmé que sa santé "s'améliorait de jour en jour", beaucoup doutent de sa capacité à diriger l'Algérie cinq années supplémentaires.
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