Un air de "changement" souffle au Burkina Faso après la crise sans précédent qui a ébranlé le régime l'an dernier, mais le président Blaise Compaoré, censé quitter le pouvoir en 2015 après un long règne, reste le chef d'orchestre et garde le silence sur son avenir.
"Aucune parcelle de la société burkinabè ne peut échapper au changement aujourd'hui", affirme à l'AFP le porte-parole du gouvernement, Alain Edouard Traoré."La crise de 2011 a créé les conditions pour des changements positifs en matière de gouvernance dans l'armée, l'administration, bref dans la société burkinabè en entier".
Symbole de ce renouvellement: en place depuis 2002, Roch Marc Christian Kaboré, chef du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), le parti présidentiel, vient d'annoncer qu'il quitterait son poste lors du prochain conclave, avancé au mois de mars.Objectif affiché: "restructurer" cette formation pour l'ouvrir aux femmes et aux jeunes.
Arrivé en 1987 à la tête de ce pays pauvre d'Afrique de l'Ouest par un putsch contre le "père de la révolution" Thomas Sankara, M. Compaoré a senti le sol se dérober sous ses pieds au premier semestre 2011, face à de violentes manifestations populaires et surtout des mutineries en série.
Il s'est efforcé depuis lors de reprendre en main l'armée, nommant de nouveaux chefs, mais a aussi opéré ces derniers mois un coup de balai inédit dans la haute administration: presque tous les patrons d'entreprises publiques ou parapubliques - la plupart en poste depuis 10-15 ans - ont été remplacés.
Il a également engagé une recomposition de son camp en rappelant auprès de lui des personnalités tombées un moment en disgrâce.
Ainsi Salif Diallo a-t-il fait son grand retour.Ministre pendant près de 17 ans, il a longtemps été considéré comme "l'oeil et l'oreille" de "Blaise", avant d'être débarqué en 2008 et nommé ambassadeur en Autriche.
Compaoré après Compaoré?
Mais tous en sont pas convaincus.
"Tout ce remue-ménage du président qui change ses +bonzes+ vise simplement à renouveler la vieille classe politique pour montrer qu'il est en phase avec la jeunesse", analyse Luc Marius Ibriga, enseignant de droit public à l'université de Ouagadougou.
Avant les législatives et municipales de novembre, le chef de l'Etat répond à "la soif de changement des populations" par "des réformettes", assène l'avocat Guy Hervé Kam, co-initiateur en 2010 d'une pétition visant à empêcher un nouveau mandat de M. Compaoré en 2015.
Le président, qui aura 61 ans en février, "n'est pas prêt à une alternance, il n'est pas prêt à partir", tranche-t-il.
Le "changement" claironné par le pouvoir ira-t-il jusqu'au sommet de l'Etat ?, se demande souvent la presse burkinabè.
La question d'une révision, réclamée par le CDP, de l'article 37 de la Constitution qui interdit à M. Compaoré de se représenter à la prochaine élection, reste plus que jamais posée.
L'opposition, d'importantes organisations de la société civile et la puissante Eglise catholique affichent leur hostilité à une telle modification.Des "assises nationales" sur les "réformes politiques" n'ont permis fin 2011 de dégager aucun consensus sur ce sujet explosif.
L'intéressé garde un silence total sur ses intentions, laissant libre cours à toutes les spéculations.
Mais si publiquement son parti est unanime sur l'opportunité d'une révision, en privé certains responsables expriment leurs réserves, quelques mois après une grave crise politique."Le contexte n'est pas du tout favorable et le Burkina Faso n'en a pas besoin", glisse un cacique du CDP.
Pour le porte-parole du gouvernement, "ce n'est pas le temps d'en parler".
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