Burundi: deux manifestants tués par la police, la Belgique hausse le ton

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Bujumbura (Burundi) (AFP)

Au moins deux manifestants ont été tués par les tirs de la police jeudi à Bujumbura, où la contestation contre un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza a repris de plus belle malgré la riposte musclée des policiers.

Dans le quartier de Musaga (sud), un des bastions de la contestation, la police a poursuivi ses opérations de "restauration de l'ordre" lancées la veille.Les tirs ont duré toute la journée, alors que des manifestants tentaient de se regrouper dans les ruelles et harcelaient les forces de l'ordre à coups de pierres.

Les policiers ripostaient avec leurs kalachnikov, tirant au jugé et parfois à hauteur d'homme.Un manifestant a été mortellement touché au dos, selon des témoins.

A Ngagara, des affrontements ont éclaté avec un groupe d'une centaine de contestataires près de l'Assemblée nationale, réunie en session extraordinaire pour la prestation de serment de trois nouveaux ministres.

Les policiers, déployés en nombre autour du bâtiment, ont ouvert le feu.Au moins deux manifestants ont été blessés par balle, dont l'un, grièvement touché à la tête, est décédé peu après.

Le porte-parole de la Croix-Rouge burundaise, Alexis Manirakiza, a confirmé à l'AFP ce bilan de deux morts, et fait état de 8 blessés.Les équipes de la Croix-Rouge n'ont pas eu accès à Musaga "en raison de l'intensité des tirs" sur place, a-t-il précisé, laissant entendre que le bilan pourrait être plus élevé.

Jeudi après-midi, dans la zone de Musaga, les opérations policières se sont visiblement étendues au quartier voisin de Kanyosha (sud), où des tirs nourris pouvaient être entendus.

Plus d'une vingtaine de personnes ont été tuées depuis le début, fin avril, des manifestations contre une candidature du président Nkurunziza à un troisième mandat à l'élection présidentielle du 26 juin.Ce mouvement, qui touche essentiellement la capitale Bujumbura, a été sévèrement réprimé par la police.

Le pays est depuis lors plongé dans une grave crise politique, avec un coup d'�?tat manqué la semaine dernière, et des élections générales censées débuter le 5 juin, qui ont déjà été reportées d'une semaine sous la pression internationale.

 

- La Belgique hausse le ton -

 

Comme quasi-quotidiennement depuis 25 jours, les manifestations ont repris de plus belle jeudi dans plusieurs quartiers de la capitale, jusqu'au centre-ville, où des dizaines de femmes sont parvenues brièvement à se regrouper.

Arrivées discrètement, ces femmes se sont rassemblées sur la place de l'Indépendance, petite victoire symbolique et objectif sans cesse proclamé par les figures du mouvement anti-troisième mandat.

Elles ont été dispersées manu militari après l'intervention en force de la police sur la place."C'est notre droit de manifester notre opposition à un troisième mandat de Nkurunziza, et nous allons continuer à le crier haut et fort malgré cette police au service du pouvoir", a lancé Sandrine, l'une des protestataires.Le calme est revenu peu après.

Mercredi, le président Nkurunziza avait assuré que "la paix et la sécurité règnent sur 99,9% du territoire burundais", jugeant que le mouvement "d'insurrection" n'était "signalé que dans quatre quartiers" de Bujumbura.

Secouée par le coup d'�?tat avorté, l'armée a appelé ses troupes à la "cohésion", condition de la "survie du Burundi en tant que nation".Le nouveau ministre de la Défense et le chef d'état-major, fidèle parmi les fidèles du chef de l'�?tat, ont recommandé "de ne pas s'ingérer dans la gestion des affaires politiques, et d'éviter toute forme de violence".

Ils ont demandé aux militaires qui se "cachent jusqu'à l'heure actuelle à regagner leurs unités", sans préciser leur nombre.

Depuis le début de la contestation contre un troisième mandat présidentiel, l'armée est jugée plus neutre que la police, accusée d'être aux ordres du parti au pouvoir.

Après la sanglante guerre civile qui a opposé la minorité tutsi et la majorité hutu (1993-2006), l'armée était parvenue, au terme des accords de paix d'Arusha, à incarner la réconciliation et l'unité retrouvée du pays.Mais elle se retrouve aujourd'hui traversée par de fortes tensions. 

A ce jour, près de 110.000 Burundais, fuyant la crise politique dans leur pays, ont trouvé refuge dans les pays voisins, dont 70.000 en Tanzanie.Une épidémie de choléra s'est déclarée parmi ces réfugiés vivant dans des conditions sanitaires très difficiles sur les rives du lac Tanganyika et a fait à ce jour 27 morts.

Sur le plan diplomatique, alors que le gouvernement burundais apparaît de plus en plus isolé sur la scène internationale, la Belgique, ancienne puissance coloniale, a menacé d'arrêter son aide bilatérale au pays en cas de troisième mandat de M. Nkurunziza.

La France quant à elle s'est dite "préoccupée par les violences et la dégradation du climat politique", selon le Quai d'Orsay, qui souhaite "l'ouverture du dialogue pour engager la désescalade".

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