Les pays occidentaux ont haussé le ton lundi contre le pouvoir burundais, confronté à un mouvement d'opposition à un troisième mandat du président Pierre Nkurunziza, demandant un report des élections et annonçant des suspensions de l'aide électorale.
Sur le terrain, les manifestations se sont poursuivies lundi dans les quartiers périphériques de la capitale Bujumbura, foyers de la contestation.Aucun incident majeur n'a été signalé, mais la Croix-Rouge a soigné une dizaine de blessés survenus dans des affrontements légers avec la police.
Samedi, les autorités burundaises ont sommé les manifestants de cesser "immédiatement" et "sans condition" leur mouvement et demandé aux forces de sécurité de "déblayer" toutes les barricades sous 48 heures.Soit d'ici lundi soir.
Depuis le début du mouvement le 26 avril, des heurts ont opposé les opposants à la police et à des jeunes du Cndd-FDD (les Imbonerakure, une "milice" selon l'ONU).Les violences ont fait 19 morts.Selon les Nations unies, plus de 50.000 Burundais ont fui dans les pays voisins, terrorisés par le climat pré-électoral.
"Nous avons encouragé fortement le gouvernement burundais à prendre des mesures d'apaisement et l'idée d'un glissement du calendrier électoral serait à nos yeux une bonne chose", a déclaré lundi l'envoyé spécial de l'UE pour la région, Koen Vervaeke.Il s'exprimait aussi au nom de la Suisse et des Etats-Unis lors d'une réunion mensuelle entre les Européens et le gouvernement, auxquels se sont joints les deux autres pays.
Les Pays-Bas et la Suisse ont aussi annoncé la suspension de leur aide électorale au Burundi, suivant l'exemple de la Belgique, ex-puissance colonisatrice du pays.
Ces déclarations interviennent à deux jours d'un sommet régional à Dar es Salaam en Tanzanie, au cours duquel devraient aussi faire pression sur Pierre Nkurunziza les pays d'Afrique de l'Est (Rwanda, Kenya, Tanzanie, Ouganda), appuyés par l'Afrique du Sud.
Pretoria avait été très impliqué dans le processus de réconciliation qui avait ouvert la voie à la fin de la longue guerre civile burundaise (1993-2006).
La semaine dernière, la présidente de la Commission de l'Union africaine Nkosazana Dlamini-Zuma avait déjà jugé que le climat n'était "pas propice" à des élections.
- 'Les armes circulent' -
Le Burundi, petit pays d'Afrique des Grands Lacs, a prévu le 26 mai des législatives et communales, suivies le 26 juin par une présidentielle.
Le processus électoral est estimé par Bujumbura à quelque 60 millions de dollars (53 millions d'euros).Le Burundi dit pouvoir en assumer 21 M USD (18 M EUR) et a réclamé 39 M USD (35 M EUR) d'aide.Les Belges avaient promis 4 M EUR, les Pays-Bas 2,4 M et les Suisses 250.000 francs suisses (240.000 euros).Tous ont déboursé la moitié et suspendu le reste.
L'UE a elle promis 8 M EUR, dont 6 ont été versés.Selon un diplomate, l'UE n'ayant pas les mêmes mécanismes décisionnels, une suspension n'a pas été décrétée à proprement parler, mais de facto son aide est aussi suspendue.
Le ministre burundais des Relations extérieurs, Laurent Kavakure, a "pris note" de ces suspensions.Mais "suspension veut dire que ce n'est pas définitif", a-t-il ajouté.
"Nous avons commencé à prendre certaines mesures pour améliorer la situation et nous sommes déterminés à créer les conditions pour des élections libres, transparentes et apaisées", a-t-il affirmé.
Pierre Nkurunziza, déjà élu en 2005 et 2010, a été désigné candidat à la présidentielle par son parti, le Cndd-FDD, le 25 avril.
Les contestataires jugent qu'un troisième mandat serait anticonstitutionnel et surtout contraire aux accords d'Arusha qui avaient permis de clore la guerre civile.Le camp présidentiel juge la démarche parfaitement légale.
"Notre volonté c'est que le Burundi réussisse le processus électoral", a poursuivi lundi M. Vervaeke.Mais "les conditions minimales pour aller aux élections ne sont pas réunies, c'est-à-dire la liberté des médias, de manifester pacifiquement".
"Nous sommes d'accord que les armes circulent, et que les jeunes sont en possession des armes.C'est évidemment très troublant d'avoir des supplétifs des corps de défense et de sécurité, comme cela s'est vu", a-t-il ajouté, parlant des Imbonerakure.
La communauté internationale et les pays de la région craignent depuis des mois que la candidature de Pierre Nkurunziza ne débouche sur de nouvelles violences à grande échelle.Les analystes redoutent aussi de graves conséquences régionales si la crise dérapait.
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