L'armée sénégalaise était lancée dimanche à la poursuite des auteurs du massacre ce week-end de 13 jeunes dans une forêt de Casamance, région du sud du Sénégal en proie à une rébellion depuis 35 ans mais qui avait connu une accalmie depuis plusieurs années.
"L'armée vient encore de se déployer ce matin (dimanche) et procède à un ratissage en profondeur.On entend des coups de feu", a témoigné un habitant du village de Bourafaye Baïnouk, proche des lieux de la tuerie et de Ziguinchor, la principale ville de cette province agricole et touristique frontalière de la Guinée-Bissau et séparée du reste du Sénégal par la Gambie.
Dès samedi, l'armée sénégalaise a déployé une compagnie de quelque 150 parachutistes pour évacuer les victimes et "traquer" les auteurs de l'attaque, selon un porte-parole de l'armée, le colonel Abdou Ndiaye.
Une délégation ministérielle était attendue à Ziguinchor pour "évaluer la situation sécuritaire et présenter les condoléances de la nation aux familles éprouvées".Dans la ville, les habitants vaquaient normalement à leurs occupations, a rapporté un correspondant de l'AFP.
L'attaque s'est produite samedi dans une forêt lorsque des jeunes partis chercher du bois mort ont été surpris par une bande d'hommes armés.Selon le gouvernement, elle a "occasionné la mort de treize jeunes hommes, dont dix par balle, deux par arme blanche et un brûlé".Sept autres ont été blessés par balles, dont un grièvement, selon la même source.
"C'est vers 08H00 (GMT et locales) que j'ai été arrêté par deux hommes armés dans la forêt.Ils m'ont contraint à leur remettre mon téléphone et à rejoindre d'autres personnes qui avaient été arrêtées avant moi", a raconté à une radio locale un rescapé, Amadou Diallo."Vers 11H00, ils m'ont emmené en profondeur (dans la forêt) où attendait le gros de la troupe, composée d'une vingtaine de gens armés.Ces derniers nous ont intimé l'ordre d'enlever nos chaussures et de nous coucher, puis ils ont tiré sur nous avant de se retirer.Moi, je n'ai pas été touché".
- La paix à l'épreuve -
Acte d'une "rare barbarie" pour le gouvernement sénégalais, le massacre met à l'épreuve le processus de paix en Casamance, relancé en octobre lors d'une réunion à Rome entre le gouvernement et une faction du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) mandatée par l'un de ses chefs, Salif Sadio.
Cette médiation se fait sous l'égide de la très discrète communauté catholique de Sant'Egidio de Rome, médiatrice dans ce conflit qui dure depuis décembre 1982 et a fait des milliers de victimes civiles et militaires, ravagé l'économie de la région et poussé de nombreux habitants à fuir.
Le massacre de samedi, le pire depuis des années, ne devrait toutefois pas faire dérailler ce processus de paix, estiment les autorités locales et des observateurs.
"C'est une situation que nous regrettons tous mais je pense que ça n'aura pas une incidence négative sur le processus de paix qui est enclenché", a déclaré Ibrahima Sakho, gouverneur de Ziguinchor, alors que les tractations de paix se sont multipliées depuis l'arrivée au pouvoir du président Macky Sall en 2012.
"Il y a une dynamique irréversible pour aller vers la paix.Tous les acteurs en tireront les conséquences et continuerons à travailler pour consolider la paix", a ajouté le gouverneur, cité par le site d'information PressAfrik.
Cette tuerie est survenue au lendemain de la libération par l'armée de deux combattants du MFDC, divisé en factions rivales, notamment celle de Salif Sadio du "Front Nord", à laquelle ils appartiendraient, et celle de César Atoute Badiate, qui dirige le "Front Sud".
"A chaque fois qu'un acte est posé entre l'Etat et le camp de Sadio, il y a des incidents, et vice-versa.Il faut travailler aux retrouvailles entre les différentes factions si on veut la paix", a relevé dimanche un observateur de la crise casamançaise sous couvert de l'anonymat.
"C'est possible que ce soit des règlements de comptes" entre rebelles, a estimé une source sénégalaise proche de la médiation interrogée par l'AFP.
"Je ne suis pas convaincu que ce soit les branches avec lesquelles les discussions sont engagées qui aient commis de tels actes.Je ne pense pas qu'il y ait une remise en cause du processus de paix", a ajouté cette source.
Dans ses voeux de fin d'année, le chef de l'Etat sénégalais avait lancé un appel aux rebelles pour la poursuite des pourparlers en vue d'"une paix définitive".
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