L'avion d'Air Algérie, qui s'est écrasé au Mali le 24 juillet, a été pulvérisé à son impact au sol après avoir perdu de la vitesse et viré à gauche pour une raison encore indéterminée alors qu'il traversait une zone orageuse, a-t-on appris jeudi.
"Quand on voit la trajectoire, cela conduit à penser que l'avion ne s'est pas désintégré en plusieurs morceaux en vol", a déclaré Rémi Jouty, directeur du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) lors d'une conférence de presse.
Il a justifié cette hypothèse par la concentration des débris présents au sol.
"Je ne pense pas que l'on puisse à ce stade exclure la thèse d'une action délibérée, mais on ne peut pas en dire plus pour l'instant", a-t-il néanmoins ajouté.
Selon les éléments d'ores et déjà établis: l'avion, un McDonnell Douglas MD-83 immatriculé EC-LTV, a traversé une zone orageuse.L'avion transportait 116 passagers et membres d'équipage, qui ont tous péri.
L'appareil, loué auprès de la société espagnole SwiftAir, devait relier Ouagadougou à Alger.Il s'est finalement écrasé dans le nord du Mali environ 32 minutes après son décollage.
"La trajectoire de l'avion (...) fait apparaître une montée et un début de croisière normal, avec des changements de route modérés, typiques d'une stratégie d'évitement des développements orageux", a expliqué Rémi Jouty.
L'avion avait décollé de Ouagadougou à 1h15, heure locale."Environ deux minutes après le début de la croisière (...) la vitesse a diminué progressivement", a détaillé le BEA.
Puis, l'avion est parti en virage à gauche avant de perdre rapidement de l'altitude, "avec des changements d'inclinaison et d'assiette très importants".
"La rotation vers la gauche continue jusqu'à la fin de l'enregistrement.Et le dernier point enregistré, à 1H47mn15s, correspond à une altitude de 1.600 pieds (490 mètres), une vitesse de 380 noeuds environ (740 km/h) et une vitesse de descente extrêmement importante", a ajouté le BEA.
- Conversations de l'équipage "inexploitables" -
Parallèlement, Rémi Jouty a révélé que le BEA n'était pas en mesure dans l'immédiat d'exploiter les données d'une des deux boîtes noires, celle contenant les enregistrements des conversations de l'équipage.
"La bande magnétique de l'enregistreur phonique, Cockpit Voice Recorder, qui était endommagée, a pu être remise en état et lue.Malheureusement, les enregistrements qu'elle contenait se révèlent inexploitables, en raison vraisemblablement d'un défaut de fonctionnement sans lien avec les dommages résultant de l'accident", a-t-il dit.
Il a précisé qu'il y avait bien du "signal sonore enregistré sur la bande mais ce signal est inintelligible à ce stade".Le BEA a souligné s'être tourné "vers les meilleurs experts" pour tenter de lire le signal.
"Les réflexions se poursuivent pour tenter de trouver un moyen d'en extraire quelques informations, mais il n'est pas possible de présager du résultat de cette démarche", a encore expliqué le BEA.
N'Faly Cissé, président de la Commission sur les accidents et incidents de l'aviation civile au Mali, a estimé de son côté que les échanges que l'appareil a pu avoir avec les équipages d'autres avions pourraient donner des indications sur ces conversations.
Le BEA remettra un rapport d'étape mi-septembre, a-t-il en outre précisé.
Parmi les 116 victimes figuraient 54 Français (pour certains binationaux), 23 Burkinabés, huit Libanais et six Algériens ainsi que les six membres de l'équipage, tous Espagnols.
Ce point presse se tenait au lendemain du retour, en France, des gendarmes français, envoyés sur la zone d'accident dans le nord-est du Mali, pour collecter notamment les restes humains à des fins d'identification des victimes.
Aux côtés d'homologues maliens, espagnols et algériens, ils ont passé une semaine à ratisser le site, proche de la ville de Gossi, à environ 150 kilomètres de Gao.
"Scientifiquement, nous avons une forte probabilité d'identifier toutes les personnes", avait indiqué le colonel Patrick Touron, évoquant un choc "quasi instantané".
La lecture des boîtes noires puis leur analyse sont cruciales dans un accident d'avion. Grâce à ces enregistrements, près de 90% des accidents peuvent être expliqués.
Le BEA mène une enquête purement technique dont le but est d'améliorer la sécurité aérienne.Les responsabilités pénales sont elles du ressort de la Justice.
Sur le volet judiciaire, trois enquêtes ont été ouvertes: au Mali, en France et au Burkina Faso.
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