Déplacés, ruinés, les Soudanais de Mossoul songent à rentrer au pays

Infos. ...

Hammam al-Alil (Irak) (AFP)

Ils ne sont pas irakiens, mais ils ont souffert autant que tous les habitants de Mossoul dans la guerre entre jihadistes et forces irakiennes.Ces Soudanais qui ont tout perdu songent à rentrer au pays.

La plupart d'entre eux avaient émigré en Irak dans les années 1980, quand ce pays apparaissait comme un eldorado économique aux yeux des nations plus pauvres du Moyen-Orient et du Maghreb.

Ils y sont restés malgré l'invasion américaine, la montée des violences puis du groupe jihadiste Etat islamique (EI).Mais quand les combats se sont faits plus violents à Mossoul-Ouest entre les troupes gouvernementales et l'EI, ils ont suivi le mouvement de fuite des civils irakiens.

Ces travailleurs immigrés soudanais se retrouvent aujourd'hui ruinés.Regroupés dans une grande tente fournie par les Nations unies dans le camp de déplacés de Hammam al-Alil, au sud de Mossoul, ils dorment sur de simples matelas de mousse.

"Nous étions venus en Irak pour construire quelque chose, mais nous avons tout perdu", confie à l'AFP Yaacoub Mohammed Adel, un homme originaire de Khartoum qui tenait jusqu'en mars un petit café dans le quartier de Mossoul al-Jadida, dans la partie occidentale de la deuxième ville d'Irak.

- 'Ils ont eu pitié' -

"Nous voulons des dédommagements pour les propriétés que nous avons perdues (...).Nous voulons rentrer au Soudan, mais pas les mains vides", explique-t-il.

Les quartiers ouest de Mossoul où vivaient et travaillaient la plupart d'entre eux, ont subi d'importantes destructions en raison des combats et des bombardements aériens.

Ahmad Abdallah raconte être venu en Irak depuis le Darfour, une région de l'ouest du Soudan ravagée elle aussi depuis des années par un violent conflit.

"Sous Saddam, les choses allaient bien dans le pays", dit-il en référence à l'ex-dictateur renversé en 2003."Il y avait du travail à Bagdad, à Bassora, à Mossoul.Le pays était sûr.A l'époque, il y avait environ 50.000 Soudanais en Irak".

Selon lui, les jihadistes n'ont jamais véritablement pris pour cible la petite communauté soudanaise de Mossoul.

"Nous les Soudanais, nous n'avons jamais vraiment été très religieux.Mais l'EI ne nous a jamais demandé de laisser pousser notre barbe ou même de prêter allégeance.La plupart d'entre nous sont âgés, j'imagine qu'ils ont eu pitié", dit-il."Ils nous ont ignorés".

Maintenant ces travailleurs soudanais craignent d'être encore oubliés et nombre d'entre eux pensent à regagner leur pays.

La situation à "El-Facher (la capitale de l'�?tat du Darfour-Nord) est actuellement mille fois meilleure qu'à Mossoul.En fin de compte, le Soudan est mon pays", dit Ahmad résigné."Ma famille me manque.Cela fait longtemps".

- 'Vue sur mer' -

Personne de la quinzaine de Soudanais présents au camp n'est rentré au pays depuis qu'ils l'ont quitté.Et quand l'EI contrôlait leur quartier à Mossoul, ils ne pouvaient appeler leurs proches, les téléphones étant interdits.

"Lorsque je suis sorti (de Mossoul), j'ai appelé ma famille.Ils ne savaient même pas que j'étais vivant", raconte Yaacoub Mohammed.

Ibrahim Zakariah, originaire du Darfour, a tout perdu pendant les combats acharnés à Mossoul ces deux derniers mois.Mais pas son sens de l'humour.

"Vous voyez, j'avais juste cette chemise quand j'ai pris la fuite.J'ai acheté ces sandales en plastique ici", dit-il en montrant son coin de la tente.

"Mais j'ai une chambre avec vue sur mer", plaisante-t-il, en pointant du doigt une flaque d'eau formée après la pluie près de son matelas.

Arrivé en Irak en 1987, il a passé plusieurs années dans le quartier Battawine à Bagdad, principal secteur de la capitale abritant des travailleurs d'Egypte et du Soudan.

Il ne sait pas s'il veut retourner au Soudan et espère qu'une rencontre prévue avec une délégation de la Croix-Rouge débouchera sur des compensations.

"Personne ne nous aide ici et nous avons tout perdu", se désole Ibrahim Zakariah.

"Mais je suis un vieil homme, peut-être que je ferai autre chose à Mossoul si j'ai l'occasion.Nous avons fait face à plusieurs guerres en Irak, nous nous sommes habitués", ajoute l'homme âgé de 55 ans, un foulard blanc autour de la tête.

Il raconte avoir perdu le contact avec sa famille depuis longtemps."Je pense qu'ils sont morts, je ne sais pas.Si j'y retourne, peut-être je resterai avec ma s�?ur.Si elle me reconnaît encore".

Newsletter

Restez informé ! Recevez des alertes pour être au courant de toutes les dernières actualités.
Réagir à cet article

L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.

En direct
Les rendez-vous santé
Nos applications
Facebook
Twitter
Instagram
Déplacés, ruinés, les Soudanais de Mossoul songent à rentrer au pays