La Haute cour constitutionnelle égyptienne a rejeté lundi la décision du président Mohamed Morsi de rétablir le Parlement, augurant d'une épreuve de force entre la présidence et la justice ainsi que l'armée, qui avait récupéré le pouvoir législatif.
"Les jugements et l'ensemble des décisions de la Haute cour constitutionnelle sont définitifs, ne peuvent faire l'objet d'un appel (...) et sont contraignants pour toutes les institutions de l'Etat", a souligné dans un communiqué la Cour, qui avait jugé le Parlement invalide en juin.
Les Etats-Unis ont appelé les dirigeants égyptiens au "respect des principes démocratiques" pour sortir de cette confrontation.
Plus d'une semaine après que le Conseil suprême des forces armées (CSFA) lui a remis le pouvoir exécutif, M. Morsi a ordonné dimanche par décret l'annulation de l'arrêt du 15 juin dissolvant l'Assemblée du peuple, et invité la chambre, où les islamistes disposent d'une majorité écrasante, à se réunir de nouveau et à exercer ses prérogatives.
La décision de M. Morsi, premier président islamiste et civil d'Egypte, laisse présager une confrontation avec le CSFA, qui s'était attribué mi-juin le pouvoir législatif après l'arrêt de la Haute cour.
Les Frères, dont M. Morsi est issu, sont les rivaux historiques des militaires qui dominent le système politique depuis la chute de la monarchie en 1952.Ils ont annoncé une manifestation mardi "pour soutenir les décisions du président et le rétablissement du Parlement".
Saad al-Katatni, président de l'Assemblée et membre de la confrérie, a convoqué une session mardi.
Le décret présidentiel prévoit aussi "l'organisation d'élections anticipées pour la Chambre, 60 jours après l'approbation par référendum de la nouvelle Constitution du pays, et l'adoption d'une nouvelle loi régissant le Parlement".
Le CSFA a convoqué dimanche soir une "réunion urgente sous la présidence du maréchal Hussein Tantaoui pour examiner les mesures présidentielles".Aucun communiqué n'a encore été publié.
"séisme politique"
"Morsi a dit au CSFA échec et mat", écrit en Une le quotidien indépendant Al-Watan, tandis qu'un autre quotidien, Al-Tahrir, titre "Morsi a battu le CSFA", à qui Hosni Moubarak, emporté par un révolte populaire, avait remis le pouvoir en démissionnant en février 2011.
Pour certains journaux, les décisions prises par M. Morsi s'apparentent à un "séisme politique" et le nouveau président risque d'avoir à se mettre à dos l'appareil judiciaire.
"Dans un pays démocratique, un président ne peut manquer de respect à la justice", affirme Rifaat al-Saïd, chef du parti de gauche Al-Tagammu."Qu'il le veuille ou non, Morsi doit respecter les décisions de la justice", a dit ce dirigeant politique à la télévision d'Etat.
Une marche vers le Parlement est prévue dans la journée, a encore déclaré M. Al-Saïd, affirmant que plusieurs partis allaient boycotter les sessions de la chambre.
L'Assemblée du peuple avait été dissoute après une décision de la Haute cour constitutionnelle la déclarant illégale en raison d'un vice juridique dans la loi ayant régi l'élection des députés pendant l'hiver.
Ce scrutin s'était soldé par un raz-de-marée islamiste: les Frères musulmans avaient remporté près de la moitié des sièges et les fondamentalistes salafistes près d'un quart.
Sur la base de cette décision de justice, le CSFA a annoncé qu'il exercerait le pouvoir législatif jusqu'à l'élection d'une nouvelle Assemblée du peuple, s'octroyant du même coup un droit de veto sur tout article de la future Constitution.
Les Frères musulmans ont alors accusé les militaires d'avoir orchestré cette dissolution pour s'adjuger le pouvoir législatif, dénonçant un véritable "coup d'Etat" et affirmant que pour eux, l'Assemblée du peuple restait valide et gardait le pouvoir législatif.
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