C'est une série de vidéos postées depuis début septembre sur Facebook par un entrepreneur égyptien en exil, Mohamed Aly, qui a poussé des centaines de personnes à manifester les 20 et 21 septembre aux cris de "Sissi dégage", avant d'être dispersées à coups de gaz lacrymogènes.
Après ces manifestations ayant créé la surprise, M. Aly, qui accuse le président Abdel Fattah al-Sissi et l'armée de corruption, avait appelé à une "marche du million" dans tout le pays.
Elu en 2014 après avoir renversé son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi un an plus tôt, M. Sissi s'est imposé comme l'une des figures les plus autoritaires du Moyen-Orient, écartant impitoyablement toute velléité de contestation ou d'opposition.
Un témoin a déclaré qu'"environ 3.000 personnes" ont répondu à l'appel à manifester, sur l'île de Warraq, au Caire, précisant que la police avait tiré du gaz lacrymogène.L'AFP n'a pas pu confirmer le nombre de manifestants.
Au Caire, le déploiement des forces de l'ordre était particulièrement important sur la place Tahrir, épicentre de la révolte populaire de 2011 qui a chassé le président Hosni Moubarak du pouvoir.
Tous les accès à la place étaient fermés à la circulation et les cafés étaient quasiment tous fermés depuis une semaine.Les rues autour étaient désertes et les policiers ont procédé à de nombreux contrôles.
Selon un autre témoin, des manifestations limitées ont eu lieu dans les villes de Qus et Qena (sud)."Une centaine de personnes sont sorties à Qus et ont déchiré des banderoles à l'effigie de Sissi", a-t-il déclaré, ajoutant que "la sécurité contrôle la situation".
- "Pas d'inquiétude" -
Parallèlement, environ un millier de manifestants ont défilé en soutien au président au Caire, près de la tombe de l'ancien président Anouar el-Sadate, brandissant des portraits de M. Sissi et scandant des chants patriotiques, selon des images diffusées par la télévision d'Etat.
M. Sissi a déclaré plus tôt qu'il n'y avait "pas de raison de s'inquiéter" des appels à manifester contre lui.
Depuis une semaine, les autorités ont pourtant choisi de renforcer considérablement la sécurité dans les villes et ont arrêté environ 2.000 personnes, dont des journalistes, des intellectuels et des militants politiques, selon Human Rights Watch et des ONG locales.
Dans la première réaction officielle du pouvoir, le procureur général a affirmé qu'un millier de personnes avaient été arrêtées et interrogées.
La Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme Michelle Bachelet a appelé vendredi les autorités égyptiennes à "changer radicalement" d'approche face aux manifestations, demandant la libération "immédiate" des personnes détenues pour avoir exercé leur droit à manifester.
"Les manifestations à venir devraient certainement rencontrer une résistance ferme", a assuré à l'AFP H.A Hellyer, membre associé du Royal United Services Institute.
Selon lui, M. Sissi a clairement fait comprendre par le passé "qu'il a l'intention de rester au pouvoir".
Le président égyptien se pose en rempart contre le terrorisme depuis qu'il dirige le pays de 100 millions d'habitants.Malgré les difficultés économiques persistantes, une grande partie des Egyptiens voient en lui le seul capable d'assurer la stabilité du pays.
- "Calomnies" -
M. Sissi peut aussi compter sur le soutien massif des médias, aussi bien étatiques que privés, et jouit de soutiens à l'étranger où plusieurs pays comme l'allié américain voient en lui un rempart contre les extrémistes.
Dans ses vidéos, M. Aly a affirmé que des millions de livres égyptiennes de fonds publics ont été utilisés dans des projets inutiles et des palais présidentiels.
"Mensonges et calomnies", a rétorqué mi-septembre M. Sissi, niant en bloc les accusations de corruption et affirmant qu'il construisait des palais non pour lui-même mais pour l'Egypte.
Dans un pays où environ une personne sur trois vit sous le seuil de pauvreté, la construction de palais au moment où le gouvernement impose des mesures d'austérité est susceptible de réveiller la colère chez de nombreux Egyptiens.
Depuis 2016, le gouvernement a mis en place un programme de réforme en vue d'obtenir un prêt de 12 milliards de dollars du Fonds monétaire international.Il comprend une dévaluation de la livre égyptienne, qui a perdu près de la moitié de sa valeur face au dollar, et une baisse des subventions étatiques, notamment sur le gaz, l'électricité et les carburants.
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