"Nous déplorons beaucoup d'irrégularités quant à la liberté et la transparence du processus électoral ainsi qu'à l'équité dans le traitement de certains candidats et des électeurs", a déclaré le président de la Conférence des Évêques catholiques du Burundi, Mgr Joachim Ntahondereye.
Cette prise de position contraste avec un communiqué commun des diplomates en poste au Burundi publié mercredi qui ne fait aucune allusion à d'éventuelles irrégularités et qui appelle seulement l'opposition à privilégier les voies de recours légales pour contester les résultats.
Ces diplomates, parmi lesquels les ambassadeurs d'Allemagne, de Belgique, de France, de l'Union européenne, ou encore la chargée d'affaires des États-Unis, disent encourager "tous les acteurs du processus électoral à préserver un climat pacifique".
"Dans l'intérêt collectif, le groupe exhorte donc tous les acteurs nationaux à faire preuve de responsabilité et à résoudre les différends pouvant résulter du processus électoral à travers les procédures légales existantes", ajoutent-ils.
Ce communiqué est le résultat d'un consensus a minima entre ceux qui voulaient féliciter le parti au pouvoir, le CNDD-FDD, et ceux qui se voulaient plus critiques, a expliqué à l'AFP une source diplomatique ayant requis l'anonymat.
Ils voulaient avant tout faire passer le message qu'ils "ne soutiendront pas toute partie qui voudrait recourir à la violence", a ajouté cette source.
Mgr Ntahondereye, qui s'exprimait dans un enregistrement sonore transmis mardi soir à l'AFP par les services de communication de la conférence, a dressé une longue série d'irrégularités similaires à celles dénoncées par le parti du chef de l'opposition, Agathon Rwasa, officiellement deuxième de la présidentielle.
L'Église catholique "déplore notamment la contrainte exercée sur certains mandataires à signer d'avance le dépouillement du contenu des urnes, le bourrage de certaines urnes, le vote à la place de défunts et de réfugiés, les procurations multiples et donc invalides, le fait qu'il y ait eu dans certains bureaux de vote des électeurs qui ont voté plus d'une fois".
Elle dénonce également "l'exclusion de mandataires et d'observateurs des lieux de dépouillement du scrutin, l'intimidation et les contraintes exercées sur certains électeurs par des administratifs qui les accompagnaient jusque dans les isoloirs, l'intrusion de personnes non autorisées dans les lieux de comptage".
"Face à ces irrégularités et bien d'autres, nous nous demandons si elles ne portent pas préjudice aux résultats (définitifs) à proclamer" le 4 juin par la Cour constitutionnelle, s'est interrogée la Conférence des Évêques catholiques.
L'Église catholique est parvenue à déployer 2.716 observateurs le jour du scrutin et "bien que leur nombre soit inférieur à celui des bureaux de vote, ils ont pu arriver dans toutes les communes où ils se sont déployés dans des bureaux ciblés", a précisé Mgr Joachim Ntahondereye dans son communiqué.
Aucune mission d'observation de l'ONU ou de l'Union africaine n'avait été autorisée par le gouvernement burundais.
L'Église catholique est la première Église du pays, qui compte environ 11 millions d'habitants.
Lundi, la commission électorale burundaise a déclaré le candidat du parti au pouvoir, Evariste Ndayishimiye, large vainqueur de la présidentielle avec 68,72% des voix, très loin devant Agathon Rwasa (24,19%).
Le parti de M. Rwasa, le Conseil national pour la liberté (CNL) a dénoncé "une mascarade électorale" et annoncé son intention de déposer un recours devant la Cour constitutionnelle d'ici jeudi.
Si le recours de l'opposition est rejeté, M. Ndayishimiye sera investi en août pour un mandat de sept ans renouvelable une fois, à la fin du mandat du président sortant.
En 2015, la candidature du président Pierre Nkurunziza à un troisième mandat controversé avait plongé le pays dans une crise politique majeure, qui a fait au moins 1.200 morts et poussé à l'exode quelque 400.000 Burundais.Il avait annoncé en 2018 qu'il ne serait pas candidat à sa succession.
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