La participation à la présidentielle et aux législatives de dimanche en Guinée-Bissau s'est élevée à environ 70%, a annoncé lundi la commission électorale, signe fort de la volonté des électeurs d'en finir avec la violence politico-militaire dans leur pays.
"Le bilan est positif si l'on tient compte de l'affluence des électeurs dans les différents bureaux de vote.La participation dépasserait les 70%", a déclaré à des journalistes le président de la Commission nationale électorale (CNE), Augusto Mendes.
Un tel taux serait exceptionnel pour la Guinée-Bissau où la participation lors des précédents scrutins similaires n'excédait pas 60%.
M. Mendes a affirmé que la CNE était en train de "faire des efforts" pour que les résultats soient publiés dès "mercredi".
Dans les bureaux de vote qu'ils ont visités dimanche à Bissau, des journalistes de l'AFP avaient constaté une très forte affluence avec de nombreuses files d'attente d'électeurs patients et déterminés à en finir avec le passé trouble de leur pays habitué aux coups d'Etat à répétitions, dont le dernier date du 12 avril 2012.
Selon Vincent Foucher, analyste à International Crisis Group (ICG), spécialiste de la Guinée-Bissau, cette mobilisation "montre que les gens ont voulu dire +non+ aux coups d'Etat militaires" et "qu'il y a chez eux un vrai espoir de voir des gens nouveaux à la tête du pays".
Treize candidats se présentaient à la présidentielle et ceux de 15 partis aux législatives.
Parmi les candidats à la présidentielle, figuraient José Mario Vaz et Abel Incada, qui représentent les deux principales formations politiques du pays: le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC) et le Parti de la rénovation sociale (PRS) de l'ex-président Kumba Yala décédé le 4 avril.
Le PAIGC, parti historique de la guerre d'indépendance contre le colonisateur portugais et toujours le mieux implanté dans le pays, a appelé ses partisans à ne pas manifester avant la proclamation officielle des résultats.
Le PAIGC devrait largement l'emporter aux législatives et son candidat à la présidentielle sera - sauf énorme surprise - présent à un très probable second tour prévu le 18 mai.
L'armée avait apporté son soutien à Nuno Gomes Nabiam, 51 ans, un ingénieur de l'aviation civile proche de Kumba Yala.
Paulo Gomes, 50 ans, candidat indépendant et atypique qui a dirigé la division Afrique subsaharienne de la Banque mondiale, pourrait créer la surprise et son nom revenait souvent dimanche chez de jeunes électeurs interrogés après leur vote.
- Forte implication internationale -
Les élections de dimanche doivent rétablir la légalité constitutionnelle deux ans après le putsch d'avril 2012 qui avait renversé le régime du Premier ministre Carlos Gomes Junior entre les deux tours d'une présidentielle interrompue de facto.
Le putsch avait été mené par le chef de l'armée, le général Antonio Indjai, inculpé il y a un an aux Etats-Unis pour son implication dans le trafic de drogue dont la Guinée-Bissau est devenue une plaque tournante en Afrique de l'Ouest ces dernières années.
Les élections présidentielle et législatives auraient dû avoir lieu un an après le coup d'Etat mais ont été plusieurs fois reportées.
L'implication et les fortes pressions des partenaires étrangers de la Guinée-Bissau, en particulier de ses voisins ouest-africains, pour que les scrutins aient lieu au plus vite et pacifiquement, ont fini par payer.
Mais la peur d'un nouveau putsch après la publication des résultats reste forte si le candidat élu à la présidentielle ne convient pas aux chefs de l'armée.
"Il y a toujours un risque de coup d'Etat, mais la vraie différence par rapport aux élections de 2012, c'est le degré d'engagement de la communauté internationale dans la préparation de ces élections", selon Vincent Foucher.
Interrogé par l'AFP deux jours avant les élections sur les chances de survie d'un candidat à la présidentielle qui n'aurait pas le soutien de l'armée, Paulo Gomes avait répondu: "Je poserais la question inverse.+Quelles sont les chances de survie d'un candidat qui serait soutenu par l'armée et qui ne serait pas légitime, et combien de temps il pourrait tenir?+".
Il avait ajouté croire que les militaires "comprennent que cette élection est vraiment différente".
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