Le centre-ville grouille de monde, l'administration, les écoles et les commerces sont ouverts.Mais derrière l'apparence d'un quotidien normal, les habitants de Guéckédou, une des villes les plus touchées par l'épidémie d'Ebola dans le sud de la Guinée, ont peur.
Dans cette grosse agglomération de quelque 200.000 personnes, "tout le monde a peur.Celui qui parle comme celui qui ne parle pas, tout le monde a peur.C'est comme si chacun attendait son tour", affirme Koin Barry, employé administratif dans une station-service rencontré sur son lieu de travail.
Avec Macenta, également dans le sud, et la capitale Conakry, Guéckédou est une des villes où les autorités guinéennes et des organisations internationales sont mobilisées contre l'épidémie de fièvre hémorragique qui a fait 83 morts en Guinée sur 127 cas enregistrés depuis janvier, selon le dernier bilan communiqué mercredi par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Le virus Ebola, hautement contagieux et mortel dans 90% des cas, a été confirmé en laboratoire comme à l'origine de 35 cas au moins.Il n'a ni vaccin, ni traitement et, selon les spécialistes, l'isolement des malades confirmés et des cas suspects est l'unique moyen de casser la chaîne de sa transmission.
Mariam Sandounou, 14 ans, raconte qu'après l'annonce de l'apparition de la fièvre Ebola, sa mère lui a interdit de se rendre dans son école primaire publique Patrice Lumumba, qui compte un millier d'élèves, pour éviter tout risque de contamination.
Pendant ce temps, poursuit-elle, deux de ses amies, qui n'étaient pas des élèves de l'école, sont décédées à domicile des suites de fièvre hémorragique.
"J'ai dit à ma mère: +Même si je vais ne pas à l'école, je vais mourir ici à la maison si Dieu le veut+.Elle m'a dit de reprendre les cours, sous la pression aussi de mon papa, fonctionnaire à Conakry".
Avec son centre-ville animé, ses commerces, écoles et administration qui fonctionnent, la ville affiche un semblant de normalité.Mais, fait inhabituel, on remarque un ballet incessant de véhicules estampillés Médecins sans frontières (MSF), une des organisations les plus actives dans le combat contre l'épidémie avec l'OMS, qui coordonne la lutte.
- Ne pas ajouter le malaise à la peur -
MSF a monté des structures de prise en charge pour l'isolement des malades, dont un centre installé dans la cour de la Direction préfectorale de la Santé de Guéckédou.Des dizaines de gens - des Guinéens et des étrangers - y travaillent, et ceux qui doivent entrer en contact avec les cas suspects et confirmés d'Ebola portent des combinaisons totalement hermétiques de la tête aux pieds, avec gants, lunettes, masques et bottes.
L'ONG mène aussi avec l'aide d'autres acteurs des actions de sensibilisation et la recherche d'autres cas.
Lors d'une séance de sensibilisation mardi, un laborantin s'est réjoui du travail mené sur le terrain mais a estimé que les bruyantes évacuations de malades vers le centre d'isolement ajoutaient le malaise à la peur au sein de la population.
"Tout ce que nous demandons à nos confrères de MSF, c'est d'arrêter d'utiliser la sirène de l'ambulance dans le transfèrement" des malades, "cela met mal à l'aise la population qui ne comprend pas que MSF garde au secret sans visites les malades jusqu'à leur mort", a-t-il expliqué.
L'ONG a appelé lundi à une "mobilisation contre une épidémie d'Ebola sans précédent", en expliquant que la dissémination du nombre de cas sur le territoire compliquait "énormément la tâche" pour enrayer sa propagation.
En plus de la Guinée, deux cas d'Ebola ont été confirmés au Liberia voisin.Des cas suspects ont été rapportés en Sierra Leone, autre pays limitrophe de la Guinée, mais ils ont été testés négatifs au virus Ebola, d'après l'OMS dont le porte-parole, Gregory Härtl, a tempéré les déclarations de MSF sur l'épidémie sans précédent.
"L'Ebola provoque déjà assez d'inquiétude et nous devons faire très attention à la façon dont nous caractérisons une flambée avec des cas sporadiques" et en termes de bilans.De précédentes épidémies ont été plus graves que celle en Guinée, qui "est encore relativement faible.Les grandes épidémies ont eu plus de 400 cas", a déclaré M. Härtl mardi à Genève.
Toutefois, a-t-il précisé, "les flambées épidémiques d'Ebola sont toujours extrêmement préoccupantes.(Elles) ne peuvent jamais être considérées sous contrôle tant qu'il ne s'est pas passé 42 jours depuis le dernier cas".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousEnvie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.