Des émeutes ont éclaté mercredi dans la capitale gabonaise, Libreville, dès l'annonce de la réélection du président Ali Bongo Ondimba devant l'opposant Jean Ping, qui s'est auto-proclamé vainqueur en accusant le pouvoir de fraude.
Selon les résultats officiels, le président sortant a été réélu pour un deuxième septennat avec 49,80% des suffrages devant M. Ping (48,23%), ex-cacique du régime du défunt Omar Bongo, père de l'actuel chef de l'Etat qui a dirigé ce petit pays pétrolier d'Afrique centrale pendant 41 ans jusqu'à sa mort en 2009.
Des affrontements entre forces de l'ordre et manifestants criant "Ali doit partir" ont éclaté juste après que le ministre de l'Intérieur, Pacôme Moubelet-Boubeya, eut proclamé les résultats officiels provisoires du scrutin à un tour tenu samedi dans le calme.
Les forces de l'ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes pour repousser les manifestants qui voulaient s'approcher du siège de la Commission électorale, ont constaté des journalistes de l'AFP.
Armée, forces de police anti-émeutes, gendarmes cagoulés ont bloqué la circulation sur la voie express, l'un des principaux axes de la capitale avec des canons à eau et des blindés légers.
Malgré les lacrymogènes, des centaines de personnes tentaient de converger sur la voie express, parfois en brûlant des pneus.
"Jean Ping président", "On nous a volé les élections", criaient les manifestants.
Des hélicoptères tournaient dans le ciel et des colonnes de fumée s'échappaient de plusieurs quartiers populaires.
Des troubles ont également éclaté à Port-Gentil, la capitale économique où des violences avaient déjà marqué la première élection d'Ali Bongo en 2009.
- Victoire étriquée -
Dans ce scrutin très serré, dont M. Ping, 73 ans, rejette les résultats et dont il s'était proclamé vainqueur, faisant craindre des troubles post-électoraux, le président sortant, âgé de 57 ans, devance son rival de 5.594 voix, sur un total de 627.805 inscrits.
Le taux de participation a été de 59,46% avec 356.890 suffrages exprimés, M. Bongo recueillant 177.722 voix et M. Ping 172.128.
Une province fait exception par son taux de participation, celle du Haut-Ogooué, berceau de la famille Bongo, où la participation atteint, selon les résultats officiels, 99,93%.M. Bongo y a recueilli 95,46% des suffrages, selon ces résultats.
L'opposition conteste ces chiffres et a demandé en vain un comptage des voix bureau de vote par bureau de vote.
"M.Jean Ping réaffirme vigoureusement, en accord avec l'Union européenne et les Etats-Unis, que le recomptage bureau par bureau, devient le seul moyen de garantir désormais la loyauté du scrutin", ont indiqué son chargé de communication au Gabon, Jean-Gasaprd Ntoutoume Ayi, et son avocat à Paris, Me Eric Moutet.
Face aux craintes de troubles, les pressions s'étaient multipliées dans les heures qui ont précédé le vote de la Commission électorale pour reprendre les résultats bureau de vote par bureau de vote.
Fait unique dans l'histoire politique du pays, le secrétaire général du Parti démocratique du Gabon (PDG), au pouvoir depuis des décennies, a pris ses distances avec le président sortant.
Le numéro deux du parti, Faustin Boukoubi, a encouragé la commission "à prendre toutes les dispositions idoines afin de publier des résultats fondamentalement crédibles".
- Pressions internationales -
Les pressions sont aussi venues de la France, l'ex-puissance coloniale, et de l'Union européenne.
A Paris, le quai d'Orsay a demandé aux autorités "d'assurer transparence et impartialité dans la publication des résultats"."De même, les éventuelles contestations qui suivront devront emprunter les voies de recours ouvertes par la loi", a-t-il ajouté.
Bruxelles a pour sa part demandé aux autorités gabonaises de "publier les résultats par bureau de vote", et non au niveau national, au nom d'"une pleine transparence", dans une déclaration des services de la chef de la diplomatie européenne, Fédérica Mogherini.
Mardi, M. Ping avait répété qu'il se considérait vainqueur.L'entourage du président Bongo évoquait également depuis samedi une "avance" qui lui garantirait la victoire.
Ex-baron du régime du président Omar Bongo, opposant tardif après l'élection de son fils Ali en 2009, Jean Ping prétend mettre fin au règne de la famille au pouvoir depuis 1967.
Ali Bongo a défendu son bilan avec des "investissements sans précédent" et la diversification de l'économie, en promettant "l'égalité des chances" et de faire mieux pour le logement.
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