En se concoctant une transition "démocratique" sur mesure, la junte et l'ex-opposition en Guinée-Bissau ont engagé un bras de fer avec l'Afrique de l'Ouest et les pays lusophones qui semblent déterminés à faire plier les putschistes, y compris par des moyens militaires.
"Le temps est venu de dire non à la domination des armes sur les urnes", a lancé jeudi soir devant le conseil de sécurité de l'ONU le chef de la diplomatie portugaise Paulo Portas, venu plaider pour l'envoi d'une force de stabilisation dans cette ancienne colonie portugaise, victime d'un coup d'Etat le 12 avril, le quatrième en moins de quinze ans.
Pourraient contribuer à cette "mission de stabilisation" des contingents d'Afrique de l'Ouest et de pays lusophones, notamment des soldats angolais déjà présents sur place dans le cadre d'un accord bilatéral de coopération.
"Ce qui est en cause, c'est le choix entre un Etat basé sur l'ordre constitutionnel ou un Etat-voyou basé sur le pouvoir du trafic de drogue", a affirmé le ministre portugais, qui a demandé des sanctions internationales contre les auteurs du coup et "ceux qui les appuient politiquement".
Minée par une instabilité chronique, la Guinée-Bissau est devenue ces dernières années la plaque-tournante du trafic de cocaïne entre Amérique du sud et Europe, avec la complicité souvent dénoncée de la haute hiérarchie militaire et de certains reponsables politiques.
En annonçant jeudi, une semaine après le coup, un "transfert inéquivoque du pouvoir aux civils", la junte, qui maintient toujours en détention le président intérimaire Raimundo Pereira et le Premier ministre Carlos Gomes Junior, n'a guère convaincu.
Pire, l'alliance de circonstance entre l'armée et les anciens opposants au régime renversé a provoqué la colère des voisins de la Guinée-Bissau qui se sont sentis dupés par les militaires.
"Usurpation de pouvoir"
Ces derniers s'étaient engagés "par écrit" lundi à "se retirer pour permettre un retour immédiat à la normalité constitutionnelle", selon le président de la Commission de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) Désiré Ouédraogo.
Jeudi, faisant fi de leurs promesses, la junte et l'ex-opposition ont annoncé la nomination d'un nouveau président de transition en la personne de Manuel Serifo Nhamadjo, un dissident du parti au pouvoir éliminé au premier tour de la présidentielle du 18 mars, remporté par l'ex-Premier ministre Gomes Junior.
Le président du futur Conseil national de transition (CNT) a également été choisi.Il s'agit du vice-président du Parti de la Rénovation sociale (PRS) de Koumba Yala, principal opposant à Gomes Junior.
Qualifié pour le deuxième tour de la présidentielle initialement prévu le 29 avril, M. Yala avait refusé d'y participer arguant de "fraudes massives".
La date de l'investiture des nouveaux organes de transition, prévue pour fonctionner deux ans, n'a pas été précisée.
En attendant, la Cédéao a affirmé qu'elle rejetait cette "usurpation de pouvoir" fait savoir qu'elle ne reconnaîtra "aucune transition émanant de la junte".
A Bissau, le Front commun anti-putsch, formé jeudi autour de l'ex-parti au pouvoir, le Parti africain pour l'indépendange de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC) apparaissait divisé sur la stratégie à suivre dans les prochains jours, certains militants souhaitant braver l'interdiction de manifester décrétée par la junte qui a déjà promis une "répression sévère".
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