Visage de cire, posture rigide, cet universitaire de 61 ans s'est fait connaître en décryptant depuis 2011 les premiers soubresauts de la démocratie tunisienne sur les plateaux télévisés.
"Je suis le premier du premier tour, et si je suis élu président j'appliquerai mon programme", a-t-il déclaré à l'AFP, dans un petit appartement délabré du centre de Tunis, entouré d'une quinzaine de personnes ayant participé à sa campagne.
Toujours impeccablement sanglé dans son costume, cet indépendant sans parti politique a un credo "anti-système" et très conservateur.
Pontifiant sur les manquements à la Constitution, dans un arabe châtié, parfois ampoulé, il a souvent éclairé les débats et rebondissements parlementaires de la Tunisie post-révolutionnaire, lorsqu'il était invité par les principales chaînes de télévision du pays.
Ce néophyte en politique, commentateur des chamailleries partisanes, est apparu dans les sondages au printemps, et son ascension est été perçue comme l'expression du ras-le-bol vis-à-vis de la classe politique traditionnelle.
Son principal axe de campagne a d'ailleurs été de critiquer les élites au pouvoir, renvoyant dos à dos tous les partis, et refusant tout programme vendant de "l'illusion".
M. Saied propose un changement de système en changeant d'institutions: réforme de la Constitution et des modes de scrutins, décentralisation "afin que la volonté du peuple parvienne jusqu'au pouvoir central et mette fin à a corruption", a-t-il indiqué durant sa campagne.
"Le rôle traditionnel et habituel du pouvoir central est fini", selon lui."Le peuple crée la richesse et doit en bénéficier".
"Puisque le slogan (de la révolution de 2011, ndlr) est +le peuple veut+, donc le peuple doit pouvoir mettre en oeuvre ce qu'il veut", martèle-t-il.
- Campagne low-cost -
Nombre d'analystes s'attendaient à le voir marginalisé en raison des faibles moyens mobilisés autour de sa candidature.
Sa campagne, low-cost, n'a donné lieu à aucun meeting --en revanche il a sillonné une centaine de villes, serrant les mains sur les marchés ou dans les cafés, avec une placidité à toute épreuve.
"Je suis un candidat indépendant, je ne représente aucun des partis", a-t-il fait valoir sur la radio Shems FM."Je fais ma campagne par mes propre moyens, et je refuse tout aide, même un millième".
Régulièrement entouré de jeunes, étudiants ou jeunes actifs, il défend des positions socialement conservatrices sur un ton professoral en maniant un arabe littéraire châtié.
Selon le comparatif de l'Observatoire pour la défense du droit à la différence, qui a classé les candidats selon leurs positions sur les libertés individuelles, M. Saied est l'un des plus conservateurs: il est contre l'abolition de la peine de mort, contre l'abrogation des textes punissant l'homosexualité et les atteintes à la pudeur --ce dernier texte ayant servi à condamner des couples non mariés s'embrassant dans la rue.
Il s'est également prononcé clairement contre l'égalité en matière d'héritage, une question délicate car elle touche à un principe dicté par le Coran, selon lequel une femme hérite le plus souvent moitié moins qu'un homme du même degré de parenté.
Lors d'un débat jeudi soir sur la chaîne Hiwar Ettounsi, le candidat a été confronté à une photo de lui en train de boire un café avec un ex-cadre du mouvement salafiste interdit Hizb-ut-Tahrir, Ridha Belhaj.Il a indiqué qu'en tant que candidat, il avait le droit de rencontrer toute le monde.
"Est-ce que je dois demander l'autorisation pour rencontrer quelqu'un?Après tout, je n'ai pas rencontré un hors-la-loi," a-t-il répondu sur les ondes de la radio Shems FM.
Chargé de cours à la retraite, M.Saied est père de trois enfants.
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