Des policiers kényans ont été victimes mardi d'une attaque attribuée aux islamistes shebab près de Garissa, dans l'Est du Kenya, où les insurgés somaliens avaient massacré près de 150 personnes début avril.
Le porte-parole de la police George Kinoti a fait état de 13 disparus parmi les forces de l'ordre, mais une source policière s'exprimant sous couvert d'anonymat a évoqué des morts.
De son côté, le préfet de la région James Kianda a assuré que tous les officiers répondaient à l'appel et le ministre de l'Intérieur Joseph Nkaissery n'a fait état que de cinq blessés.
"Il y a eu une embuscade contre des policiers en patrouille", a expliqué M. Kinoti."Des renforts policiers ont été déployés pour rechercher les disparus et traquer les assaillants".
Selon des sources policière et sécuritaire, l'attaque est survenue en deux temps dans la nuit de lundi à mardi près de la frontière somalienne dans les environs du village de Yumbis, à quelque 70 km au nord-est de Garissa.
Selon ces sources, un engin piégé a d'abord explosé au passage d'une patrouille de police, suivi de brefs échanges de tirs.Un convoi de quatre véhicules de police a été envoyé en renfort et est tombé dans une embuscade.Les quatre véhicules ont été détruits par des tirs de lance-roquette RPG des assaillants.
La source policière s'exprimant sous couvert d'anonymat a expliqué que l'incident avait eu lieu "dans la zone la plus isolée de Garissa, pas très loin de la frontière avec la Somalie", justifiant les "difficultés à avoir des informations précises".
- Raids shebab -
L'attaque attribuée aux shebab est intervenue quelques jours seulement après un nouveau déploiement de forces de sécurité kényanes dans la région, visée par plusieurs raids des islamistes liés à Al-Qaïda ces dernières semaines.
La semaine dernière, le village de Yumbis lui-même avait déjà été le théâtre d'une incursion shebab: selon la presse kényane, les insurgés, lourdement armés, avaient fait une leçon d'islamisme aux habitants et planté leur drapeau sur un poste de police laissé à l'abandon.Un incident similaire avait eu lieu dans une mosquée de la zone quelques jours plus tôt.
La région de Garissa, comme les autres zones kényanes frontalières de la Somalie - Mandera, Wajir et jusqu'à Lamu et Mombasa sur la côte -, sont le théâtre d'attaques récurrentes, d'ampleur variable, des shebab.
Les islamistes, qui avaient aussi revendiqué l'attaque sanglante du centre commercial Westgate de Nairobi (67 morts en septembre 2013), ont promis une guerre impitoyable au Kenya tant qu'il ne retirerait pas ses troupes lancées dans le sud somalien à leur poursuite fin 2011.
Voisines d'une Somalie livrée au chaos depuis plus de deux décennies, dont elles sont séparées par 700 km de frontière poreuse, ces régions du nord-est kényan, pauvres, longtemps négligées, peuplées majoritairement de somali et de swahili musulmans stigmatisés, sont devenues une cible privilégiée des islamistes: ils y trouvent relais, terreau propice à la radicalisation, et pour toute opposition un appareil sécuritaire souvent faible et corrompu.
Depuis l'attaque contre l'université de Garissa le 2 avril, dans laquelle 142 étudiants ont trouvé la mort, la zone est restée particulièrement instable.
Pour tenter d'endiguer les attaques islamistes - en 2014, des raids sanglants menés à Mandera et Lamu avaient déjà fait plus de 160 morts -, les autorités ont promis de renforcer la sécurité, et même de construire un mur ou des pans de mur le long de la frontière pour empêcher les incursions shebab.
Ces annonces laissent cependant sceptiques les analystes, convaincus que des cellules shebab sont déjà implantées au Kenya, d'où elles recrutent et opèrent sans avoir besoin de passer la frontière.Les observateurs dénoncent même, en général, une politique kényane contre-productive en matière de contre-terrorisme: une stigmatisation des populations somali et musulmanes en général qui ne fait qu'exacerber les tensions.
strs-aud/jhd
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