L'Afrique du Sud a fêté jeudi le 10e anniversaire de son programme d'émancipation économique des Noirs qui a fait émerger une classe moyenne multiraciale inexistante durant le régime raciste de l'apartheid mais pas assez d'industriels noirs, et est source de nombreuses fraudes.
"Il y a des réussites et des difficultés", a admis le président Jacob Zuma, en ouvrant un sommet de deux jours à Johannesburg pour "réfléchir à ce qui marche et ce qui ne marche pas" dans la loi de 2003.
Le système d'émancipation économique des Noirs (BEE) impose aux entreprises de promouvoir à des postes de direction du personnel noir --terme générique désignant toutes les communautés délibérément brimées sous l'apartheid, Africains, Indiens et Métis--, de former du personnel noir et de s'approvisionner auprès d'entreprises noires.
L'entreprise doit publier un rapport régulier (chaque année pour les employeurs de plus de 150 salariés), elle est notée en fonction de ses performances, et un score élevé permet par exemple de prétendre à des marchés publics.
"Cela pose problème que la participation noire à l'économie continue de prendre surtout la forme de programmes de participation en actions", a souligné jeudi M. Zuma."Plus important encore, nous attendons encore de voir l'essor d'industriels noirs."
Depuis la fin de l'apartheid en 1994, le nombre de cadres et de dirigeants noirs dans l'économie sud-africaine a progressé, mais la majorité des très hauts responsables sont encore des Blancs de sexe masculin.C'est particulièrement vrai dans les mines (67% de hauts dirigeants blancs), les usines (plus de 66%) ou les plantations agricoles (75%) selon des données 2011.
Ce n'est pas nécessairement le manque de qualifications appropriées qui est en cause dans la faible proportion de très hauts dirigeants africains, selon l'Institut sur les relations entre les races (SAIRR).
Le BEE a aussi l'inconvénient d'être effroyablement complexe, alimentant un juteux marché de consultants-experts en émancipation économique que les entreprises doivent rémunérer pour optimiser leur score, et ouvrant la porte à toute sorte de fraudes.
Les anecdotes abondent sur des patrons blancs ayant promu un employé de base, qui son jardinier, qui sa bonne, au sommet de la hiérarchie pour contourner la loi et être bien notés.
La loi vient de changer pour punir plus sévèrement cette pratique du "fronting" (prête-nom, ndlr).
"L'usage d'un prête-nom est impardonnable", a souligné M. Zuma jeudi, "car il donne une vision déformante et l'impression qu'il y a des progrès alors qu'il n'y en aucun.C'est la raison pour laquelle nous allons travailler dur pour empêcher et éradique cette pratique".
Les tricheurs encourent des amendes allant jusqu'à 10% du chiffre d'affaires annuel et la prison.
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